5.2.19

Ave Maria - Sinan Antoon



L’écrivain d’origine irakienne Sinan Antoon nous avait enchanté avec son premier roman « Seul le grenadier » qui avait d’ailleurs été récompensé d’un Prix de la Littérature Arabe fin 2017.
Son nouvel opus « Ave Maria » s’attaque à un sujet sensible : celui du sort réservé aux Chrétiens d’orient et tout particulièrement des Chrétiens irakiens qui furent les victimes ciblées d’attentats odieux perpétrés lors de ce qui tourna en guerre civile entre sunnites et chiites. Une guerre qui attisa la montée des mouvements extrêmes islamistes transformant les Chrétiens en une engeance à éliminer au nom de positions stupidement dogmatiques, de croyances et de principes simplement épouvantables.
Pour rendre compte de cette situation qui poussa des dizaines de milliers, au moins, de Chrétiens sur les routes diverses de l’émigration, fuyant ainsi une mort presque certaine du moins dans certaines parties d’un Irak dévasté et vaguement contrôlé par les forces armées américaines, Sinan Antoon nous plonge dans la vie quotidienne de deux personnages.
D’un côté un vieil homme, arrivé au soir de sa vie. Un Chrétien sans histoire, veuf, et qui a vu sa famille frappée par les deuils successifs et la fuite des enfants aux quatre coins du monde. De l’autre une nièce, venant de fuir son village avec son mari suite aux attentats innombrables ayant fini par causer la perte de son bébé avant terme. Elle s’est depuis installée à l’étage de la maison de son oncle en échange des courses et de la cuisine.
A tour de rôle, ils passent en revue leurs souvenirs. Ceux des temps heureux, d’un Irak uni où il faisait bon vivre en harmonie. Puis, vinrent les temps troublés ponctués d’assassinats politiques qui finirent par porter un tyran au pouvoir. Et dans cette Histoire que l’on revit à distance se nichent des pans d’histoires personnelles et familiales, des fractures, des pertes douloureuses, des victimes innocentes de plus en plus nombreuses de la folie meurtrière qui s’est emparée d’un pays en totale dérive.
Tout s’achèvera en une scène apocalyptique qui résume effroyablement l’irraison d’hommes dont le seul but est d’instituer le chaos au mépris de tout.
Un beau livre, fort et émouvant.
Publié aux Editions Actes Sud – 2018 – 182 pages