Le thème retenu par l’auteur est réjouissant et original.
Un jeune homme est recruté sur concours international par l’Institution (une sorte d’ONU qui ne dit pas son nom).
Il y est engagé comme « résumain » c’est-à-dire que sa mission consiste à résumer avec objectivité, sans passion, de façon neutre et efficace, les débats qui ont lieu dans les différents organes de l’Institution.
Ce jeune homme ne tarde pas à devenir un employé modèle, soucieux de toujours mieux faire et qui ne pense qu’à son travail. De toute façon, l’Institution songe à tout pour ses employés. Ils sont logés et nourris sur place et ne peuvent sortir de l’Institution sans permission (d’où le titre). Même le vocabulaire est normé et trois classeurs résument tout ce qu’il faut savoir pour vivre sans heurts en vase clos.
Bientôt, face à la répétition des tâches et dans un mode aseptisé et climatisé, le temps s’efface. Aucun employé n’est capable de répondre à la question de savoir depuis combien de temps ils sont embauchés. C’est le moyen mis en œuvre pour tuer dans l’œuf toute révolte.
Tout fonctionne bien jusqu’au jour où le collègue avec lequel le personnage principal du roman est en compétition professionnelle lui montre un roman. Or, l’écriture et l’imaginaire ont été mondialement interdits pour éviter toute perversion et annihiler toute faculté d’initiative créatrice.
Céline Curiol maîtrise bien son sujet pendant les deux premiers tiers de ce roman original. Le ton volontairement froidement objectif, presque chirurgical qu’emploie son héros auto-narrateur fonctionne parfaitement bien.
Malheureusement, le derniers tiers perd en qualité. Le doute qui s’empare du héros, l’arrivée inattendue de la puissance imaginaire, les perspectives nouvelles que l’écriture apporte viennent bouleverser un monde parfaitement rôdé. Mais les moyens littéraires mis en œuvre par l’auteur sont un peu poussifs et manquent de maîtrise conductrice.
On finit par s’y perdre et l’on guette la fin. C’est celle-ci qui finit par gâcher l’ouvrage. Si j’avais eu à parier sur le dénouement, j’aurais imaginé celui précisément réalisé par Curiol. Assez cousu de fil blanc.
Un livre qui plaira aux amateurs de « Galatica » ou de « The Island », un cran en-dessous, très nettement, toutefois.
Publié aux Editions Actes Sud – 253 pages
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