24.9.10

La bataille – Patrick Rambaud


Voici un Prix Goncourt (1997) particulièrement mérité.

Ecrit dans une langue solide, riche, héritière d’une belle tradition classique et romantique, ce roman subjugue immédiatement. Particulièrement si, comme moi, vous êtes amateur d’histoire et encore plus (ce qui est mon cas), passionné par l’épopée Napoléonienne.

Nous voici aux portes de Vienne en 1809. L’armée impériale, épuisée par la défaite espagnole, affamée par le blocus anglais, occupe la capitale de l’empire austro-hongrois. Une armée qui a perdu de son lustre, habillée souvent des dépouilles des soldats ennemis tombés sous les boulets ou les baïonnettes. Une armée formée pour l’essentiel de jeunes soldats qui doutent et manquent d’expérience.

Mais une armée tenue solidement par l’Empereur qui la fait vibrer par ce même magnétisme qui est le propre des grands hommes militaires et politiques. Un empereur qui a su s’entourer d’hommes de confiance qu’il a faits généraux ou maréchaux de France et qui lui doivent richesse, gloire, fortune, maîtresses…

Cependant, l’archiduc d’Autriche entend prendre une revanche après la bataille d’Austerlitz. C’est à Essling, aux portes de Vienne, qu’une bataille essentielle va se jouer. Une bataille d’une férocité sans pareille qui laissera morts plus de quarante mille hommes au bout de deux jours d’une intensité démentielle. Une bataille qui en annoncera une autre, un mois plus tard, à Wagram.

Avec un luxe de détails historiques incroyable, une précision absolue, Patrick Rambaud nous plonge au cœur des évènements. Nous sommes tour à tour cuirassiers, hommes d’infanterie, artilleurs ou grenadiers. Nous vivons et mourrons en héros, déchiquetés par les boulets, éventrés lors de corps à corps où tous les coups sont permis surtout quand les munitions manquent.

L’une des grandes réussites de ce roman est de nous montrer les doutes qui s’emparent du commandement militaire à la tête d’une armée qui n’a plus le lustre d’antan. Doutes augmentés par la supériorité numérique de l’ennemi, par sa capacité à retarder l’acheminement des renforts attendus de l’armée d’Italie.

Mais la dévotion, le sens du sacrifice, la volonté de se comporter en héros feront la différence face à l’Archiduc qui hésite sur la conduite à tenir et qui est ébranlé par une armée impériale qui se bat jusqu’à son dernier souffle et qui lui inflige des pertes incalculables.

L’Empereur finira par l’emporter de justesse, sans nette victoire, au bord lui-même de l’implosion, acculé avec les restes d’une ramée affamée, mutilée et ravagée dans une île au milieu du Danube.

Grâce au mélange superbement équilibré de personnages historiques dont beaucoup y laisseront la vie et de quelques personnages de fiction très représentatifs des hommes de base de cette armée en fin de règne, Patrick Rambaud réussit un tour de force remarquable.

Tout amateur de belles lettres et/ou de romans historiques se doit de lire ce roman complété de notes historiques très documentées.

Publié aux Editions Grasset – 302 pages