4.12.10

La terre des mensonges – Anne B. Ragde


Voici le premier tome d’une trilogie dont le volume trois reste à paraître en France à l’automne 2010. J’avais d’abord découvert le tome 2 « La ferme des Nashov » dont vous trouverez la note de lecture sur Cetalir et qui avait été récompensé d’un prix des Libraires.

Ce premier tome nous donne un certain nombre de clés pour comprendre les relations pour le moins bizarres qui règnent dans cette famille norvégienne où trois frères s’ignorent superbement et détestent un père vieux et sans relief.

Le problème, lorsque l’on commence par le deuxième tome, c’est que le premier ne tient pas vraiment la comparaison. Le style y est encore plus embarrassé que dans le deuxième, qui ne brillait déjà pas de ce côté là mais compensait largement par une bonne dose d’humour caustique et d’auto-dérision nationale.

Mais, surtout, on y trouve déjà exposés les tics des personnages, voire des scènes qui seront largement reprises et développées dans le tome suivant, de façon plus percutante, comme si la plume s’était entre temps rodée. Il en résulte un sentiment de manque d’imagination, de défaut de créativité que la lecture du seul tome suivant effacerait en soi.

Ce premier tome est donc en définitif assez poussif et tend à traîner un peu en longueur. Toutefois, l’agonie de la mère donnera l’occasion de comprendre la vraie relation entre les trois frères et leur père, de découvrir la vie cachée d’une mère maîtresse femme et qui faisait régner ordre et terreur sur une ferme qui connut son heure de gloire avant de partir à vau-l’eau. Une ferme et une famille qui vit et s’étiole à force de mensonges et de dissimulations.

On y comprendra pourquoi Erlend décida alors d’émigrer tout jeune au Danemark pour y vivre pleinement son homosexualité ainsi que les raisons d’un alcoolisme de moins en moins larvé de Tor, resté seul à élever ses cochons qu’il traite comme ses propres enfants. Ce sont là d’ailleurs les pages les plus sincères que celles qui donne à voir cet homme orphelin, jamais marié et séparé depuis l’enfance de la mère de sa fille qu’il eut tôt et par hasard, en train de dialoguer ou de pleurer à chaudes larmes avec ses truies reproductrices. Il y aura aussi l’assiduité d’une fraiche veuve envers Mardigo, celui qui a choisi de faire profession de croque-mort, et qui trouvera son dénouement ridicule dans le tome suivant. La fragilité de la fille de Tor, Torrund, appréhendée et brossée à grands traits ici, sera enfin largement développée par la suite.

Au total, ce tome initial n’est pas indispensable, le deuxième opus se suffisant à lui-même.

Publié aux Editions Balland – 2009 – 371 pages