A trop camper certains romans dans leur époque, l’auteur prend le risque d’un vieillissement prématuré. C’est exactement ce qui se passe avec « Trente ans et des poussières ».
Publié an 1992 aux Etats-Unis et en 1993 en France, ce roman à la gloire des années de facilité et d’enrichissement rapide que fut l’époque Reagan, connut un vif succès. Il a symbolisé parfaitement ce en quoi l’Amérique triomphante croyait, et aimerait croire encore, 16 ans plus tard, en pleine crise financière mondiale…
En gros, c’est en prenant des risques que l’on peut espérer gagner pour autant qu’on investisse de sa personne et que l’on sache oser. Malheur à ceux qui font marche arrière ou qui font preuve de pusillanisme, ils se feront emporter.
Pour camper ce credo, l’auteur choisit de nous conter longuement, trop longuement d’ailleurs, les déambulations et gesticulations d’un couple de trentenaires. Mariés depuis plusieurs années, ils symbolisent pour leurs amis le couple exemplaire et un peu ridicule. Pas d’amant, pas de maîtresse, une fidélité apparemment à toute épreuve. Lui, Russel, est directeur de collection dans une petite maison d’édition. Elle, Corinne, est agent de change et tente de placer des produits financiers miracle auprès de petits investisseurs particuliers.
Mais, au fond, ils s’ennuient ferme. Elle n’en peut plus de devoir faire des preuves, de forcer sa nature en poussant des placements censés enrichir le gogo à coup sûr. Et elle crève de devenir mère.
Lui défend des auteurs difficiles et aussi peu loyaux qu’ils sont retors. Peu à peu, une belle et intrigante financière de ses amies va lui susurrer de s’endetter et de se lancer dans une OPA hostile de son propre employeur et de liquider ainsi un patron qu’il abhorre.
Bref, il va finir par parvenir à ses fins mais y perdra son âme, son sommeil, son intégrité et provoquera le naufrage de son couple. Le progrès dans l’échelon social est inversement proportionnel à l’estime que chacun des époux aura pour l’autre au fur et à mesure que les façades tombent. Rassurez-vous cependant, nous sommes face à l’archétype du roman américain et il y aura une happy end très morale.
Comme le style de ce roman est au demeurant assez quelconque, il faut une intrigue solide pour tenir le lecteur en haleine. Et c’est là que le bât blesse : l’histoire traîne en longueur, un luxe de détails et de scénettes finissant par provoquer un début de nausée. Les rebondissements sont convenus et prévisibles. Le foisonnement de personnages finit de perdre le lecteur désabusé.
Moins de trente ans plus tard, on se demande comment un tel roman aussi fade trop long et un peu ridicule a pu connaître un tel succès. Un bon conseil, trouvez d’autres suggestions de lecture, Cetalir n’en manque pas !
Publié aux Editions de l’Olivier – 554 pages