Un jardin d’amour, image idyllique d’un paradis de fleurs,
de verdure et de petits oiseaux célébrant la passion et l’élévation des cœurs.
Stop, arrêtez tout ! Vous faites fausse route. Le jardin dans lequel nous
entraine Marcus Malte n’a rien de paradisiaque. Il est au contraire semé de
fleurs mortellement vénéneuses, de plantes urticantes qui laisseront des
pustules honteux, de mauvaises herbes qui sèment la vengeance, la mort et la
terreur au gré de leur colère.
Bref, c’est dans un roman policier noir que se situe
l’intrigue assez alambiquée imaginée par son auteur. Un thriller typique de la
tendance actuelle avec, comme personnage central, un flic à bout de souffle. Un
mec tellement usé par l’alcool, la fréquentation dangereuse de truands qui ont
su gagner sa protection au prix de son honnêteté qu’il ne travaille plus au
commissariat depuis belle lurette et est payé à ne rien faire comme ultime
récompense d’une carrière où il en a serré plus d’un. Le portrait robot, ou
presque, de bien des romans du genre.
Désormais rangé et bon père de famille, l’enfer va se
rouvrir sous ses pieds le jour où il recevra un manuscrit anonyme intitulé
« Garden of love ». Un récit d’une rare violence où sa propre vie,
ses propres errances lui seront racontées. Un récit dérangeant et qui va le
mener tout droit vers celui qu’il traqua toute sa vie, un ange noir de la
terreur, un virtuose de la machination et du meurtre irrésolu qui lui laisse un
embarrassant manuscrit en forme de testament.
Comme nous finirons laborieusement par le comprendre, le
roman alterne entre des extraits de ce manuscrit et la vie réelle de certains
des personnages dont des doubles théoriques auxquels d’autres prénoms ont été
donnés sont mis en scène dans le document qu’il s’agit d’interpréter. Des
doubles qui revivent une combinaison complexe de séquences réelles et d’autres
imaginées par l’esprit démoniaque et schizophrénique de leur auteur.
Ces mélanges incessants font la force et la faiblesse du
roman. Sa force en ce sens qu’ils entrainent le lecteur dans un tourbillon où
la perte de repères, l’odeur nauséabonde des bas-fonds de la société,
l’omniprésence d’une tension sexuelle quasi pornographique (avec un premier
chapitre à couper le souffle d’ailleurs) font que l’on se laisse emmener et
qu’on ne peut plus décrocher d’un livre dont on veut vraiment comprendre la
logique et la fin. Sa faiblesse aussi, car souvent on ne comprend plus rien, on
ne sait pas qui est qui, on ignore si l’on se trouve dans une section du
manuscrit cité ou dans le roman lui-même ce qui nécessite un véritable effort
de la part du lecteur pour ne pas décrocher.
Marcus Malte tient malgré tout cela avec une assez grande maîtrise
grâce à une langue acérée comme le fil du couteau qui servira à égorger les
victimes, une capacité à dire l’essentiel en peu de mots qui claquent comme la
hampe sur le mât au vent déchainé. Il est cependant dommage que la fin soit un
peu trop convenue et que le rythme, du coup, s’effondre dans le dernier quart
du roman.
Bref beaucoup de bonnes choses mais trop d’imperfections
pour en faire un roman véritablement exceptionnel. C’est simplement un bon
roman policier qui vous tiendra en haleine pendant quatre heures ce qui n’est
déjà pas mal.
Publié aux Editions Zulma – 2007 – 318 pages
Merci à Marie-Noëlle Rolland de la librairie Lirenval de St Rémy les Chevreuses d’avoir mis cet exemplaire à notre disposition dans le cadre de la sélection du Prix Michel Tournier.
Merci à Marie-Noëlle Rolland de la librairie Lirenval de St Rémy les Chevreuses d’avoir mis cet exemplaire à notre disposition dans le cadre de la sélection du Prix Michel Tournier.