Une fois refermé cet assez épais roman, on ne peut
s’empêcher de penser que l’intrigue et le thème, solides, ont été desservis par
une écriture insuffisamment maîtrisée et une succession d’erreurs de procédés littéraires. A force d’être
trop riches, certains plats deviennent indigestes et finissent par produire
l’exact effet inverse de celui recherché, et c’est bien le sentiment que donne
ce roman basque.
L’intrigue est assez simple et se déroule sur une petite
semaine. Un groupe de cinq ex-militants de l’ETA possède un hôtel aux portes de
Barcelone. Après avoir mené des actions armées violentes allant jusqu’à
l’exécution d’un otage, ils ont été emprisonnés puis amnistiés au moment où
l’Espagne démocratique a cherché à normalisé la situation. C’est avec l’argent
collecté lors de deux braquages de banques, commis immédiatement après leur
sortie de prison. Grâce à une magouille financière, ils ont fait transiter
l’argent par le frère du chef de réseau que ce dernier a, au passage fait
interner dans une clinique psychiatrique, pour son bien et celui du groupe.
Bref, un petit monde peu recommandable et discrètement dissimulé sous des
dehors rangés.
Nous sommes en pleine coupe du monde de football. L’équipe
de Pologne, jusqu’ici brillante, est basée dans cet hôtel calme et isolé de la
ville.
Un couple de militants de l’ETA vient de commettre un
attentat à Bilbao qui a tué un jeune enfant. Carlos, le chef de l’ex-réseau,
par amitié et alors qu’il semble avoir coupé tout lien idéologique avec des
idées qui ne menaient nulle part, a accepté de planquer ces dangereux individus
recherchés par toute la police d’Espagne. Une décision qu’il a prise seul, sans
consulter ses amis.
Alors que le couple devait planquer quelques jours, le temps
passe et l’organisation ne donne pas son feu vert à leur extraction. Bientôt,
la garde policière qui semblait là pour protéger l’équipe de football, se
transforme en garde militaire. Une équipe de pseudo-journalistes débarque et ne
compte que de redoutables enquêteurs de la brigade anti-terroristes. Une course
contre la montre va s’engager entre Carlos, ses amis à qui il va tantôt mentir,
tantôt avouer, leur faisant courir le risque de tout perdre, et les flics.
Bref, c’est du solide. Malheureusement, le livre se perd
dans de multiples méandres. Il démarre sur un rythme d’une insupportable
lenteur qui, plus d’une fois, m’ont mené aux bords de l’abandon. Ce n’est que
vers la cent cinquantième page que tout s’accélère et que l’intrigue devient
haletante.
Du fait de la profusion des personnages, embraqués dans des
histoires parallèles, souvent sentimentales, on a souvent du mal à suivre le
droit fil. En outre, l’auteur ne cesse de faire des incursions dans les
références philosophiques du mouvement en citant de longs passages de Rosa
Luxembourg et de penseurs trotskystes qui ont nourri le mouvement de l’ETA. Des
voix s’adressent en permanence à Ugarte : celle de son mentor, mort au
combat, celle « du Rat », sa mauvaise conscience, celle de son frère,
emprisonné à vie par lui.
Tout évolue et se croise et s’entrecroise. De longs passages
inutiles, de trop nombreux dialogues pauvres, de trop fréquentes images
littéraires maladroites finissent par gâter le roman qui laisse un goût amer.
Publié aux Editions Christian Bourgeois – 382 pages