Quel point commun entre un Premier Ministre en exercice, un
agent de sécurité, une conductrice de métro parisien et un professeur de 4ème ?
Aucun a priori si ce n’est que tous, tout à coup et au même moment, laissent tout
tomber en plan pour céder à un éloge de la paresse, un besoin de flânerie
irrépressibles, histoire de redevenir humains.
Tout avait commencé par un signe avant-coureur avec ce jouer
de football qui, au moment de tirer un penalty, avait tourné le dos au but. Et
puis, tout s’est mis à se détraquer dans un pays qui prend l’eau de toute part
et qui semble parti pour faire un nouveau Mai 68 sans violence, sans
manifestation, sans casse. Une gentillette révolution qui ne dit pas son nom
dans la bonne humeur et la convivialité générale, un moment inattendu, non
planifié où l’on pose le crayon pour dire que le « travailler plus pour gagner
plus », slogan pervers de campagne, n’est qu’une illusion qui ne mène
nulle part.
A sa façon, en toute humilité et avec une certaine joie non
détachée de naïveté, Nathalie Peyrebonne nous donne un premier roman en forme d’alerte
supplémentaire sur une société qui n’en finit plus d’aller de plus en plus mal,
faute d’objectifs, de moyens et tout simplement de projet social mobilisateur.
Alors voilà que le peuple, à tous les niveaux, se révolte passivement.
Alors, le Premier Ministre refuse de répondre aux
injonctions de la sonnerie téléphonique d’un Président surexcité prêt à
vociférer ses ordres dès potron-minet. Le voici qui se prélasse à déguster des
pâtisseries tout en savourant les gesticulations d’un chef de l’Etat qui ne
convainc plus personne sur son écran télévisé.
Le prof abandonne sans crier gare sa classe en plein débat,
pris d’une immédiate frénésie de cigarette et d’entartrage, à la recherche d’une
victime symbolique et expiatoire.
La conductrice descend de son métro sans annonce,
abandonnant des travailleurs résignés à leur sort, les invitant implicitement à
faire comme elle et à quitter des emplois qui les déshumanisent.
L’agent de sécurité se vautre dans des concoctions culinaires
complexes avant que d’aller tâter du tatami avec sa bande de copains de longue
date.
Ils viendront bientôt grossir une foule immense qui défile
calmement jusque sous les palais de l’Elysée.
Une rêverie générale me dires-vous ? Certes, mais au
train où vont les choses, il est à craindre que le réveil soit brutal et
violent lorsque l’on s’éveillera du sinistre sommeil qui semble s’être emparé
de notre pays et de notre continent.
En attendant, voici un petit livre sympathique, sans grande
prétention, rafraîchissant mais non indispensable.
Publié aux Editions Phébus – 2013 – 153 pages