Voici le premier roman d’une nouvelle-venue dans le paysage
littéraire du début des années 2000.
Un roman sur la solitude, l’adultère, la vie dure dans les campagnes,
les petits villages où chacun s’épie, tout se sait, l’intimité et le secret
impossibles.
Un roman pudique où l’auteur entreprend de nous conter le
drame de Laurent, le narrateur, vu par lui-même et cinq autres protagonistes
qui expriment leurs points de vue sous forme de courtes lettres. Car il est
bien connu qu’un fait ne sera jamais perçu, et encore moins interprété, de
façon identique, chacun de nous étant influencé par son propre vécu dans le
décodage de ce qui se passe sous nos yeux. Un décodage où la jalousie n’est pas
étrangère, où la condamnation à vouloir se croire différent des autres, les
petits, justifie par avance de toutes les peines qui finissent par s’abattre
sur ceux qui ont eu des rêves d’Icare.
Laurent, la trentaine bien engagée, électricien, est un
bosseur. Célibataire, il va tomber soudainement sous le charme de Marylène
(contraction non cachée de Marie-Hélène, tiens tiens…), la petite
bibliothécaire qui circule dans la région avec le bibliobus. Marylène a
vingt-trois ans, un passé difficile, élevée par une grand-mère austère, placée
en apprentissage comme coiffeuse, réquisitionnée pour donner un coup de mains
dans une boulangerie familiale quand nécessité fait loi.
Marylène s’est enfuie de sa Haute-Normandie où l’on voulait
l’étouffer, lui imposer une vie qui ne lui convenait pas. Marylène est belle,
elle fait tourner les têtes de tous les hommes. Laurent saura la séduire et en
faire sa compagne avec laquelle il se retire dans une maison isolée de tout,
qu’il retape entièrement. C’est leur nid douillet, leur jardin secret, le lieu
d’épanouissement idéalisé de leur amour. Un lieu où Marylène vit retirée du
monde, en ménagère, en rêveuse aussi.
Et puis, un soir, parce que le chien de Marylène se fait
renverser, la vie de ce couple qui fait des jaloux va basculer. Marylène fait
tourner la tête du vétérinaire local qui abandonnera femme et enfants,
clientèle et position sociale, pour s’enfuir avec cette femme fatale, légère et
qui redonne un sens à sa vie. Celle de Laurent va s’effondrer, ses rêves se
dissoudre avec la difficulté à accepter et à comprendre.
Et avec cet
effondrement, un acte dramatique lui fera voir ce qu’il aura été toujours
aveugle à percevoir toute sa vie durant auprès de son ami le plus proche, le
menuisier du village. Tout fuit avec la belle…
Une situation banale, mille fois mise en scène dans
l’histoire de la littérature et que MH. Lafon entreprend de conter avec une
certaine douceur comme celle de la nature qui entoure cette petite bourgeoisie
campagnarde.
Pourtant, pour notre part, nous n’avons jamais été
véritablement conquis par ce récit, bien écrit, mais qui semble manquer
cruellement de passion au point de risquer de le rendre fade. L’insertion de
lettres dont nous ne savons rien sur leurs auteurs au beau milieu d’un récit
douloureux ne rend, par ailleurs, pas la lecture très facile.
Le roman connut un beau succès d’estime lors de sa parution
mais il faut croire que nous
ferons partie des grincheux.
Publié aux Editions Buchet-Castel – 2001 – 140 pages