Dans ce court recueil de nouvelles, Scholastique Mukasonga
décrit avec pudeur et sensibilité la douleur de devoir s’exiler pour échapper
aux massacres ethniques qui ont frappé le Rwanda.
Elle donne à voir aussi et surtout comment le Rwanda en est
arrivé à une telle situation à travers de courtes histoires qui illustrent à
traits plus ou moins esquissés, de façon plus suggérée et voilée qu’explicite
comme s’il s’agissait encore de n’offenser personne, la responsabilité de la
puissance belge occupante.
On y comprend le jeu des alliances qui se sont noués sur un
fond de racisme aussi bien des blancs envers les noirs que des ethnies entre
elles. On en perçoit la fragilité extrême que le moindre changement d’orientation
ne manquera pas de précipiter à bas pour semer alors sa suite de malheurs et de
chaos.
En remontant aux décennies qui ont précédé le drame et son
million de morts, elle nous suggère que tout était déjà en place, que la
nouvelle religion imposée par la puissance occupante portait en soi, par sa
négation des traditions, des cultes ancestraux et des croyances vernaculaires,
un terrible revers, un effet boomerang prêt à frapper sans discernement.
Une fois encore, ce qui fait le charme de ces nouvelles
c’est que tout ceci est abordé par le biais, suggéré au travers une série de
sorte de petits contes africains qui nous font mieux connaître le pays dont
elle vient. On peut les lire pour ce qu’ils sont mais ils portent bien plus que
ce qu’ils racontent au premier degré.
Publié aux Editions Gallimard – 2014 – 140 pages