17.10.20

Saturne – Sarah Chiche


Voici un roman, autobiographique, qui aurait pu s’intituler « Famille, je vous hais ». Un roman où celle qui est à la fois femme de lettres, psychanalyste et psychoclinicienne tente de continuer de démêler les fils et les liens qui l’ont longtemps entravée.

 

Très jeune, Sarah perd son père. Un homme qui aurait rêvé d’être psychiatre mais que l’autorité paternelle força à devenir administrateur des cliniques que la famille émigrée d’Algérie fit fleurir, pour sa plus grande fortune, partout en France. Une petite fille à qui l’on cacha la mort d’un père. Une enfant confiée aux soins d’une mère aussi sublimement belle qu’instable, elle-même victime d’une enfance malheureuse et de parents qui, chacun à leur manière, l’abandonnèrent à son propre sort.

 

De cette enfance puis adolescence où le luxe et le confort n’étaient là que pour dissimuler les secrets, la tyrannie patriarcale, l’obligation de faire une carrière médicale pour porter le flambeau de la réussite familiale, Sarah cherchera à s’enfuir. Une fuite vers une vie de jeune adulte mouvementée, malheureuse, oscillant sans cesse entre le spectre de la dépression, atavisme paternel, du suicide social ou physique, de l’incessante oscillation entre l’amour et la haine des membres de la cellule familiale qui ont, à leur manière, qu’elle découvre peu à peu, contribué à l’abîmer, profondément.

 

Il faudra passer par bien des épreuves, frôler le vide avant de pouvoir trouver enfin sa voie et entamer la formation qui la conduira à devenir elle-même cette guérisseuse des âmes et des esprits que la vie aura blessés ou endommagés.

 

Sarah Chiche se met à nu et produit un livre de psychanalyste. Une tentative de reconstruction pour mieux déconstruire, de se débarrasser enfin de tout ce qui empêche d’avancer, de penser, d’aimer et de s’aimer soi-même. Un livre troublant et émouvant.

 

Publié aux Éditions Seuil – 2020 – 205 pages