Houellebecq avait imaginé
la France aux mains d’un pouvoir islamiste modéré mais où la conversion
religieuse avait force d’obligation pour espérer exister dans une
administration de moins en moins civile. Jean Rolin invente ce qui pourrait
être une suite ou un autre scenario catastrophe dans notre pays en proie à de
très fortes secousses. Nous voici transportés dans un pays en guerre civile,
déchiré entre les milices d’extrême-gauche et d’extrême-droite et en prise avec
un parti islamiste aux allures guerrières.
Pour tenter de faire
régner un semblant de paix et de conserver des zones de relative sécurité, des
casques bleus ont été dépêchés du Ghana et de la Finlande. C’est ce pays où les
exécutions sommaires sont devenues courantes et dans lequel les zones de
non-droit sont foison que va tenter de traverser un homme qui est aussi le
narrateur.
Chargé de remettre un
colis à un ami devenu chef d’une milice armée qui tient toute une région, le
voici sillonnant des routes défoncées au volant d’une guimbarde qui n’en peut
plus avec juste assez de carburant pour se rendre à Clermont-Ferrand. Alors que
les fusillades se répètent, que les attaques se succèdent et que les barrages
doivent être franchis les uns après les autres en usant de tous les procédés
possibles pour y parvenir, le narrateur nous conte ce qu’il observe.
Une narration sans
parti-pris, neutre, presqu’aseptique et qui se concentre beaucoup plus sur les
bruits et les couleurs d’une nature qui change au gré des saisons que sur les
évènements qui modifient sans cesse la carte des pouvoirs et des factions. Une
narration où la description des lieux traversés avec force référence à des rues
désertées, des zones commerciales dévastées, des immeubles éventrés tourne à
une obsession au début amusante mais qui finit par lasser.
Or, c’est bien là la
limite de ce roman. Bien écrit, il fait sourire et même rire face à l’absurdité
des situations rencontrées et au contraste parfaitement établi entre
l’agitation des hommes pour des causes qui restent totalement inconnues et le
côté immuable de la nature. Puis, du fait de la distanciation voulue et d’une
répétition qui tourne à l’overdose, on finit par se laisser d’autant que le
roman s’achève sur ce qui ne ressemble en rien en une fin.
Publié aux Editions POL –
2015 – 193 pages