Thierry Dancourt, nouveau venu dans le paysage littéraire,
avait fait parler de lui en 2008 avec la parution de son premier roman
« Hôtel de Lausanne » récompensé par le Prix du Premier Roman et le
Prix Roland Jouvenel de l’Académie Française. Nous avions pour notre part
franchement détesté (c’est rare) ce premier opus d’une écriture qui nous a
semblé trop lâche et au fil narratif par trop nombriliste sans parler de son
obscurité. (voir notre note sur Cetalir).
« Jardin d’hiver » marque un progrès certain.
L’écriture y est plus fluide, la poésie voulue par l’auteur s’y installe plus
facilement. Mr Dancourt semble toutefois vouer un amour sans bornes aux hôtels,
surtout ceux impersonnels, sans cachet, au bord de la fermeture définitive car
il y voit des lieux où ses personnages à la recherche d’eux-mêmes peuvent
échouer. Comment mieux cacher son anonymat que derrière une façade sans charme
dans une ville désertée ?
Dans ce deuxième roman, ce n’est plus une femme qui part
plus ou moins consciemment à la recherche de son identité, mais un homme,
encore jeune, Pascal, écrivain (ou plutôt rédacteur de livres techniques ou
historiques) qui part en quête d’une villa sur pilotis à Royan, en plein hiver.
Lorsqu’il débarque dans la station balnéaire, il y constate le vide et
l’absence de vie dans une cité qui ne s’anime que pendant la saison d’été.
Par hasard, il échoue dans un hôtel sur le point de fermer
définitivement (l’Océanic) où il va devoir composer avec un voyageur de
commerce aigri, en charge de l’immense région Charentes-Poitou, chargé de
fourguer de l’électro-ménager à des ménagères réticentes et à des retraités
circonspects. C’est lui qui va l’aider à trouver la mystérieuse villa qui
semble le hanter.
Au départ, Pascal pense passer deux ou trois jours sur
place. Mais c’est sans compter le côté un peu poisseux d’une cité sans charme
et fantomatique ni sur le hasard des rencontres qui, peu à peu, créent
d’étranges liens.
Ainsi le temps finit-il par s’écouler entre des matinées
consacrées à la garde d’un hôtel dont le propriétaire ne pense qu’à s’enfuir
pour couler une retraite impatiemment attendue et la visite à la bibliothèque
municipale, glauque et vide de livres, juste fréquentée par un vieillard qui en
fait sa cantine et son camp de base.
A l’aide d’allers-retours entre des épisodes d’une liaison
adultère entre Pascal, à peine sorti de l’adolescence, et une jeune femme anglaise
lors d’un été parisien et le quotidien insipide qui s’écoule à Royan, on finit
par comprendre que notre homme cherche à décoder le message que son amante lui
aura laissé, sous la forme d’une photographie, avant de le quitter sans un mot.
Comme dans « Hôtel de Lausanne », le récit reste
assez énigmatique et très elliptique. Il faut deviner, interpréter ou imaginer
et les séquences qui nous projettent aux pires heures de la seconde guerre
mondiale ne font qu’ajouter à une certaine confusion à une confusion par
ailleurs certaine.
Alors certes, une relative poésie se fait jour, une
atmosphère bizarre, légèrement occultée par un halo de mystère s’installe et
cela semble bien la signature de Mr Dancourt. Ce n’est toutefois pas assez, de
notre point de vue, pour faire de ce deuxième roman un livre remarquable et
même de très loin. Nous restons pour notre part assez insensible à cette
atmosphère et quelque peu perturbé par un parti-pris narratif déstructuré.
C’est en tous cas, un meilleur roman que le premier dont les récompenses et
louanges nous laissent encore perplexes.
Publié aux Editions La Table Ronde – 2010 – 169 pages