Dès que Benjamin Wassner,
le narrateur, commence à se décrire, on se dit que ce garçon de trente-huit ans
connaît de graves problèmes psychologiques. Depuis des années, il court les
psy, enchaînant les traitements, vit reclus dans une chambrette au cœur de l’un
des quartiers les plus minables de Genève, perclus de tics et de tocs.
A cela, l’explication
semble toute trouvée. Sa sœur aînée, Summer, a disparu un beau jour d’été alors
qu’elle n’avait que dix-neuf ans. Depuis, on ne sait rien de celle qui était
une belle jeune fille qui attirait tous les regards, magnétisait hommes et
femmes. Cette jeune femme bourgeoise élevée par un père qui est l’un des plus
brillants avocats genevois et une mère qui semble n’avoir pas pris une ride et
vivre d’une manière insouciante, s’est tout simplement volatilisée. Est-elle
morte noyée dans le lac, assassinée, a-t-elle fui ? Aucune réponse à cette
disparition angoissante…
Alors, près de trente ans
plus tard, Benjamin cherche toujours à comprendre car, lui qui fut un
adolescent malingre, mal dans sa peau, écrasé par le côté solaire de sa sœur,
n’a jamais vraiment réussi à devenir un adulte responsable, autonome et qui
s’assume.
On le sait, il existe
parfois de lourds secrets dans les familles, des séquences, des faits, des
choses que l’on cache, dont on nie l’existence, qu’on occulte au point de finir
par les croire à jamais disparues. C’est ce que, peu à peu, à force de travail
sur soi, de petites initiatives qui en entraîneront d’autres plus grandes puis
plus grandes encore, Benjamin (et nous avec) va finir par comprendre. Derrière
les apparences se cachent des réalités honteuses, des secrets à même de vous
détruire psychologiquement, physiquement et socialement. C’est cette vase
profondément enterrée qu’il faudra exhumer, filtrer, évacuer pour enfin pouvoir
vivre sans le poids d’un inconscient entravant.
Monica Sabolo signe un
magnifique roman, maîtrisé de bout en bout tant dans sa construction que dans
son style travaillé et alternant la lumière et l’ombre, à l’image de la famille
qu’elle illustre.
Pulié aux Editions JC
Lattès – 2017 – 320 pages