On sait que,
roman après roman, Christian Oster applique avec un succès certain une même
recette dont seuls les ingrédients et le dosage changent. Face à un problème ou
une difficulté quelconques, son personnage masculin central, sorte d’avatar
démultiplié à l’infini d’un seul et même personnage, fuit et prend la route. La
destination, les étapes, les moyens de transport changent. Mais toujours surgit
cette saisissante combinaison de hasards, d’indécision, de rencontres avec des
personnages eux-mêmes flottants qui fait le sel et le charme d’un auteur qu’on
aime particulièrement.
Cette fois-ci,
Paul semble craindre sans raison apparente un certain Carl Denver. Un critique
de cinéma auquel il a piqué sa femme Maud dont il vient cependant à son tour de
se séparer après une année ou deux de vie commune. Entre le spleen de la
rupture amoureuse, l’échec d’une carrière d’architecte brutalement arrêtée et
une personnalité qui erre sans cesse entre indécision et procrastination, Paul
va mal et est obsédé par Carl Denver dont il est persuadé qu’il veut lui nuire
pour se venger.
Solution la plus
simple selon Oster : fuir et mettre le plus de distance possible entre
Paul et Carl. Cette fois, ce sera le Massif Central à l’occasion des obsèques
d’un ami lui aussi architecte. Commence alors une série d’étapes ponctuées de
hasards et de rencontres planant sans cesse entre le loufoque et l’inquiétant.
Un périple en forme d’indécision constante, semé de messages sybillins où Paul
pense progresser en reculant sans cesse tandis que la présence fantasmée ou
réelle de Carl Denver semble se faire de plus en plus pressante.
Christian Oster
signe un de ses grands romans dont il a le secret. C’est à la fois jubilatoire,
disgressif, ponctué de réflexions qui en entraînent d’autres un peu à la
manière de Jaenada. Et la fin nous réserve une énorme surprise pour couronner
le tout !
Publié aux
Editions de l’Olivier – 2018 – 155 pages