26.10.18

Invasion – Luke Rhinehart



Luke Rhinehart s’était fait connaître par un roman coup-de-poing, l’homme-dé. Un homme qui jouait toutes les décisions de sa vie à coups de dés, laissant le hasard décider jusqu’à sombrer dans la folie la plus complète. Un roman original, d’une assez grande violence psychologique qui interpelait et qui fit grand bruit.
On retrouve certains de ces ingrédients dans le dernier gros opus de l’auteur. Imaginez un instant qu’une étrange boule ressemblant à un ballon de basket recouvert de poils saute tout à coup en pleine mer sur le toit de votre bateau de pêche. Non content de ce premier exploit, l’étrange créature fait bientôt preuve d’une agilité et d’une capacité de métamorphose absolument prodigieuse. Il n’y a plus de doute : un premier extra-terrestre vient de débarquer sur terre. Un fait qui sera bientôt étayé par le repérage un peu partout dans le monde d’autres de ces créatures ne laissant dès lors plus planer le moindre doute.
Pour la NSA et la CIA (le roman se déroulant essentiellement aux Etats-Unis), c’est une certitude que ces envahisseurs ont par définition des intentions hostiles d’autant plus qu’elles ont la capacité à apprendre le langage humain et à pirater les systèmes informatiques avec une facilité proprement stupéfiante. Pourtant les bestioles n’ont qu’un seul but qui est aussi leur raison d’être : jouer et s’amuser. C’est la raison pour laquelle elles passent en réalité leur temps à naviguer de planète en planète au sein des infinies galaxies pour inventer de nouveaux jeux leur permettant de se mesurer aux habitants locaux.
Un mode de vie inenvisageable et inadmissible pour les Conservateurs américains au pouvoir, leurs agences de renseignement et leurs forces militaires déterminés à exterminer coûte que coûte ce qu’ils ne tardent pas à qualifier d’atteinte aux intérêts supérieurs américains. On n’hésitera plus dès lors à faire voter des lois de plus en plus absurdes pour justifier de l’arrestation et de l’élimination des petites boules de poils qui font la joie des petits et des grands.
Sur cette base, Luke Rhinehart concocte un roman où l’on rit à la fois beaucoup et où l’auteur exprime sans guère prendre de gant tout le mal qu’il pense du mode de vie de son pays, de son attitude hégémonique, de la façon dont les foules sont manipulées, du pouvoir néfaste des média, de la catastrophe écologique, économique et sociale vers laquelle nous courons tout droit du fait de l’incroyable stupidité et cupidité du pouvoir politique américain actuel.
Derrière la grosse farce en première lecture se glisse en permanence une forme d’appel à se réveiller et à se révolter contre un système qui ne peut que conduire au suicide collectif. C’est un pamphlet au vitriol que nous livre en réalité Luke Rhinehart.
Publié aux Editions Aux forges de Vulcain – 2018 – 530 pages