Voici un roman qui a convaincu bien des jurys littéraires : Prix Comar
d’Or, Prix des cinq continents de la Francophonie, Grand Prix du Roman Métis,
Prix Maghreb de l’ADELF et enfin Prix Lorientales 2018. A cela sans doute une
raison essentielle : un récit en forme de conte oriental aux sens
multiples servi par une écriture simple et assez lumineuse.
Quelque part dans un pays de langue et de culture arabe qui pourrait porter
bien des noms qui font la douloureuse actualité, deux drames viennent troubler
profondément un équilibre instable. Drame d’abord personnel mais à la portée
universelle cet apiculteur, le Don, un ascète qui ne vit que pour le bien-être
de ses chères abeilles avec lesquelles il entretient une relation d’une profonde
osmose. Ce dernier vient en effet de trouver l’une de ses ruches totalement
ravagée. Il ne tardera pas à découvrir que derrière les milliers de cadavres
horriblement mutilés de ses insectes adorés se cache un redoutable
prédateur : le frelon asiatique arrivé dans les malles du tout nouveau
détenteur du pouvoir. Avec ce dernier, porté par une révolution qui fit tomber
de façon violente le précédent tyran pour porter à sa place un personnage aux
mœurs délétères sous couvert de stricts préceptes religieux, ne va pas tarder à
s’annoncer une nouvelle menace. Celle des fous de Dieu, ces barbus armés
jusqu’aux dents qui sous le fallacieux prétexte de la charité dissimulent à
peine une seule ambition : placer sous leur coupe tout un pays en
égorgeant et supprimant toutes celles et ceux qui tenteraient de s’opposer à
leurs velléités.
Deux luttes à mort s’engagent alors. Celle du Don qui n’aura de cesse de
traquer le redoutable frelon et de trouver une parade permettant à ses abeilles
de résister. Ce sera l’amas ardent, une technique mise au point par les
abeilles japonaises qui forment au-dessus du prédateur venu reconnaître la
ruche à attaquer un amas dont la température s’élève alors jusqu’à tuer le
frelon ennemi, juste en-dessous de la température de survie des abeilles
elles-mêmes. L’autre combat qui lui aussi va nécessiter de se regrouper pour
vaincre sera celui d’une société crédule ayant porté le Mal absolu en son sein
en croyant naïvement à son propre bien-être. En effet, depuis que les barbus fanatiques ont
pris le pouvoir, la vie est devenue un véritable enfer. Deux combats qui
finiront par se rejoindre lors d’une scène finale aussi terrifiante que
symbolique.
Sans être un roman de première importance, le livre ne manque pas de nous
interpeler sur les risques de toute dérive alors que le monde entier semble peu
à peu basculer vers toutes les formes d’extrêmisme porteuses, par définition, de
beaucoup plus de maux et de désastres que d’illusoires bienfaits promis aux
crédules et aux naïfs. A méditer…
Publié aux Editions Elyzad – 2017 – 231 pages