La femme en question c’est Renée Dungan, une jeune femme à
la mi-temps de la vingtaine, que l’on vient de retrouver assassinée en pleine
nuit quelque part sur l’île d’Haïti. Une femme aux multiples identités et aux
multiples vies. Sous le nom de Renée, elle est l’épouse d’un personnage plus
que louche, narcotrafiquant et informateur du FBI dont on soupçonne qu’il
pourrait être le commanditaire de son meurtre. Mais elle fut aussi Jackie
Scott, une photo-reporter sillonnant Haïti pour effectuer des reportages sur
les cérémonies vaudou. L’on découvrira bien vite qu’elle s’appelle en réalité
Dottie Kovacevic, fille d’un diplomate américain plongé jusqu’au cou dans
toutes les activités louches et guerrières de son pays, confondant parfois
intérêts nationaux et règlements de comptes personnels.
Pour suivre cette femme aussi splendide que trouble Bob
Shacochis élabore un roman-fleuve nous emmenant en ex-Yougoslavie, à la fin de
la Seconde Guerre Mondiale, où tout commence, à Istanbul où l’on découvrira la
perversité paternelle, aux États-Unis où se fomentent les assassinats
politiques et les complots à échelle internationale sur des golfs de green, en
Croatie où tout se terminera sans oublier de multiples aller-retours sur l’île
d’Haïti où corruption et règlements de comptes permanents font bien les
affaires de tout ce que le monde louche compte de profiteurs et d’agitateurs.
Car agir contre le terrorisme, contre les criminels, contre ceux qui sont en
butte avec la super-puissance américaine nécessite de constants et secrets
voyages de par le vaste monde.
Difficile d’aimer dans ces conditions où la violence est
permanente et où la plupart des protagonistes se dissimulent sous des identités
aussi fausses que multiples. Seule la duperie compte. Et quand l’amour point le
bout de son nez, c’est pour mieux disparaître tant la fureur du monde n’attend
pas.
Certains adoreront sans doute ce roman ambitieux par son
propos et sa distance ; d’autres détesteront, tant l’auteur semble parfois
se noyer dans des détails sans réelle importance, fouiller à n’en plus finir
des histoires qui s’entremêlent en un gigantesque puzzle qu’on n’aura jamais
fini d’assembler. Pour notre part, nous avons été quelque peu échaudé par la
longueur d’un roman qui n’en finit plus et qui aurait gagné à être ramassé.
L’auteur aura fini par nous épuiser et nous lasser…
Publié aux Éditions Gallmeister – 2015 – 791 pages