18.3.18

Le camp des autres – Thomas Vinau



1906 : la France de Clémenceau décide de frapper un grand coup pour venir à bout des gueux, vagabonds, déserteurs et autres romanichels qui sévissent dans les villes et les campagnes, détroussant les bourgeois, pratiquant parfois la violence voire la torture pour faire avouer à leurs victimes  l’endroit où se cache leur épargne. Ce sera la raison qui poussera à la création des fameuses Brigades du Tigre, première émanation d’une police moderne, bien formée, bien équipée. Une de ses premières opérations consistera à traquer la « Caravane à pépère », formée d’une bande de Rroms placée sous l’autorité de Jean Capello.
2013 : le Ministre de l’Intérieur de l’époque fustige les Rroms les accusant d’être fondamentalement incapables de s'adapter au mode de vie contemporain. Entre ces deux dates, un peuple, celui du monde des caravanes, des aires de stationnement sauvage et de l’insécurité qui peut l’accompagner parfois. Et l’ostracisme qui va de pair. Du coup, l’idée du nouveau roman de Thomas Vinau germe et prend forme. Il s’agira de suivre les tribulations d’un môme, jeté sur les chemins après avoir assassiné son père violent et s’acoquinant un peu par hasard, beaucoup par besoin de survie à la bande à Capello.
Le parti-pris de construction du roman de Thomas Vinau est radical au point qu’il pourra agacer beaucoup. Deux principes auxquels il ne déroge pas d’un millimètre tout au long de son récit : d’un côté des chapitres extrêmement courts (une page et demi tout au plus) où sont condensées des scènes précises, de l’autre une langue où l’argot côtoie une écriture travaillée à la recherche constante d’images fortes. Si on peut louer l’effort qui, parfois, produit un impact fort comme lors de la scène de l’attaque du loup par exemple, on finit aussi et surtout par le trouver lassant, les chapitres manquant régulièrement de liant quand ce n’est pas l’abus d’une langue vulgaire qui finit par rebuter.
On sent une révolte, une colère chez l’auteur contre l’exclusion, contre le terrorisme, contre la société en général qu’il nous dévoile d’ailleurs un peu plus dans une postface explicative. Elle est l’essence de ce livre à part qui convaincra un certain public mais laissera la majorité de côté sans doute. Pour ma part, je suis resté en dehors de bout en bout…
Publié aux Editions Alma – 2017 – 195 pages