Peter Oliva est un
écrivain canadien dont l’œuvre, encore assez confidentielle en France, est
publiée aux Editions Joëlle Losfeld. Né au Japon, il y a enseigné l’Anglais
ainsi qu’à Taiwan avant de débuter une carrière littéraire dont le premier
ouvrage « Parmi les ombres » lui a valu un prix au Canada et une
reconnaissance immédiate dans le monde des écrivains anglo-saxons. « En
marchant sur le fleuve céleste » est son deuxième roman, paru neuf ans
après le premier.
Partir vivre et
travailler à l’étranger est une expérience qui, généralement, transforme
durablement ceux qui la font. Surtout si la destination est synonyme de
culture, de références et de codes sociaux aux antipodes de l’éducation reçue
jusque-là.
C’est à cette forme de
choc plus ou moins rude que va se trouver confronté le narrateur, un jeune
professeur canadien parti enseigner l’Anglais au fin fond du Japon rural, loin,
très loin, de l’agitation assez cosmopolite de la capitale tokyoïte. Le récit
de Peter Oliva n’est pas tant celui de l’expérience vécue en soi par ce jeune
homme que plutôt une réflexion à la fois poétique et narrative sur ce que
chaque rencontre, chaque nouvelle découverte peut receler de potentiel
d’ouverture, d’enrichissement personnel, de compréhension sur soi-même et de la
culture d’où l’on vient, tout simplement parce que l’on est obligé de
l’observer par un autre prisme. C’est en même temps l’occasion de railler
gentiment l’administration tatillonne d’un pays qui s’efforce de toujours tout
encadrer et d’imposer quantité de normes censées garantir l’harmonie et la
sécurité. Il y a, on l’aura compris, une bonne dose de projection
autobiographique venue alimenter la composition du roman.
Les découvertes en pays
de détachement se font nécessairement via celles et ceux que l’on côtoie. Pour
le narrateur, les guides souvent implicites (parce qu’endossant ce rôle plus ou
moins malgré eux) pour avancer dans le dédale d’un monde inconnu seront celles
et ceux croisés sur son chemin. Un voisin enseignant dont l’originalité est de
décrypter pour son entourage restreint les us et coutumes du Pays du Soleil
Levant ; un prêtre shintoïste enseignant le Japonais avec une rigueur
militaire ; une élève qui est loin d’être insensible au charme du jeune
homme lui-même magnétiquement fasciné par cette jeune femme troublante et a
priori dangereusement inaccessible.
Autant de façons d’apprendre sur le pays où
l’on sait ne faire que passer, tisser des liens qui vous changeront
inexorablement, voir son pays natal où l’on sait son retour programmé de
manière différente.
Sans parler de monument
littéraire, il y a dans ce roman un brin autobiographique un indéniable charme,
un trouble immanent qui en font tout l’intérêt pour les curieux.
Publié aux Editions
Joëlle Losfeld – 2002 – 325 pages