Un jeune auteur nous amène sans préliminaires dans son univers débridé où toutes références à un monde normalisé et habituel disparaît. Il y a du Ionesco dans cette série de nouvelles qui repousse les limites du réel.
Des nouvelles où un personnage central, Violette, fait le lien. Une Violette dont l’apparence, l’âge, la condition sociale, les maris ou les amants changent selon la volonté inflexible d’un auteur déterminé à nous faire perdre tout repère logique.
Pourtant, les hommes conservent eux aussi les mêmes noms d’une nouvelle à l’autre. Mais, comme Violette, l’âge, le métier, la condition évolue dans un espace temps courbé et où les allers-retours sont constants.
Les noms restent, les situations changent. A vous de faire le lien si tant est qu’il y en est un…
Certes, la lecture de ces récits étonnants n’est pas un long fleuve tranquille. D’ailleurs, soit vous serez emportés par un véritable torrent irrésistible, frappés par l’audace des comparaisons, ébaudis par l’originalité des associations, des images et des situations qui se succèdent sans d’autres logiques que de laisser un rêve littéraire se dérouler, soit vous refermerez le livre rapidement car il ne sera pas fait pour vous.
Trop tôt pour savoir si un nouveau talent est né. Il faudra attendre les prochaines parutions pour se prononcer.
En tous cas, voici un livre qui sort radicalement de l’ordinaire, qui bouscule tout sur son passage, à adorer ou à détester. C’est assez rare pour être souligné.
Publié aux Editions de l’Olivier – 219 pages
Blog d'humeur littéraire - Livres, lectures, romans, essais, critiques. La lecture comme source de plaisir, d'inspiration et de réflexion.
Qui êtes-vous ?
- Thierry Collet
- Cadre dirigeant, je trouve en la lecture une source d'équilibre et de plénitude. Comme une mise en suspens du temps, une parenthèse pour des évasions, des émotions que la magie des infinis agencements des mots fait scintiller. Lire m'est aussi essentiel que respirer. Lisant vite, passant de longues heures en avion, ma consommation annuelle se situe entre 250 et 300 ouvrages. Je les bloggue tous, peu à peu. Tout commentaire est bienvenu car réaliser ces notes de lecture est un acte de foi, consommateur en temps. N'hésitez pas également à consulter le blog lecture/écriture auquel je contribue sur le lien http://www.lecture-ecriture.com/index.php Bonnes lectures !
29.7.08
26.7.08
La nuit dernière au XVe siècle – Didier VAN CAUWELAERT
Attention, petit bijou !
Voilà un roman qui détonne d’imagination, de drôlerie et de moquerie. Un roman dans lequel le lecteur alternera en sourires francs et rires spontanés tout en se demandant comment l’auteur va se tirer de la situation qu’il aura lui-même créée. Ne vous en faites pas, Mr Van Cauwelaert est un grand écrivain et il s’en sortira fort bien avec les rebondissements d’usage…
L’intrigue est simple. Un inspecteur des impôts marié, amoureux de sa femme qu’il a épousée cependant un peu par hasard, débarque dans un château, sur dénonciation, pour effectuer un contrôle fiscal sur une société spécialisée dans la fourniture d’insectes censés combattre tous les fléaux du monde.
La société comme le château renferment une collection d’individus tous plus déjantés les uns que les autres et férus, par-dessus tout, d’occultisme.
Et voilà que notre inspecteur des impôts, terne, rangé, va, par la volonté des esprits, subir les assauts répétés, tempétueux et haletants d’une jeune femme du XVe siècle, ex-châtelaine du lieu et qui voit en lui la réincarnation de son chevalier d’amant d’il y a plus de quatre cent cinquante ans.
Et comme cet amour la démange depuis lors et que son esprit, par de sombres manipulations que nous découvrons au fil des pages, n’a pu monter aux cieux, le retour de flammes est, si j’ose dire, jouissif.
A partir de là, l’auteur s’en donne à cœur joie pour mettre en scène, et gentiment écorner au passage, toutes les sciences occultes et ce qu’elle comporte d’ésotérisme. Tout y passe et donne lieu à d’hilarantes séances d’écritures automatiques dans lesquelle la belle dicte ses quatre volontés à son inspecteur des impôts, déboussolé, comblé mais toujours amoureux d’une épouse qui, elle, se détache de lui.
Notre administration fiscale est elle aussi aimablement gaussée et l’auteur aura su même créé un nouvel humour, l’humour fiscal, franchement décalé et très under-statement !
Au détour de ces pages dévergondées et franchement hilarantes, l’auteur nous donne cependant à réfléchir à l’influence de notre inconscient sur notre perception du réel. Car la frontière de l’occultisme emprunte sans aucun doute celle de la psychologie, du refoulement, de désirs qu’il serait trop dangereux d’exprimer directement.
Toute l’histoire se déroule sur fond de vengeance quant à elle très moderne et mêle la manipulation à la volonté de découvrir ce que notre éduction, nos valeurs, notre sur-moi nous intiment de refouler.
Pendules, fantômes, orages et esprits parlants sont au menu constant d’une histoire qui se déroule à toute allure et ne menace jamais de s’enliser. Voilà un bouquin parfait pour un film à succès…
A lire sans la moindre hésitation et avec le regret d’un plaisir trop court !
Publié aux Editions Albin Michel – 282 pages
Voilà un roman qui détonne d’imagination, de drôlerie et de moquerie. Un roman dans lequel le lecteur alternera en sourires francs et rires spontanés tout en se demandant comment l’auteur va se tirer de la situation qu’il aura lui-même créée. Ne vous en faites pas, Mr Van Cauwelaert est un grand écrivain et il s’en sortira fort bien avec les rebondissements d’usage…
L’intrigue est simple. Un inspecteur des impôts marié, amoureux de sa femme qu’il a épousée cependant un peu par hasard, débarque dans un château, sur dénonciation, pour effectuer un contrôle fiscal sur une société spécialisée dans la fourniture d’insectes censés combattre tous les fléaux du monde.
La société comme le château renferment une collection d’individus tous plus déjantés les uns que les autres et férus, par-dessus tout, d’occultisme.
Et voilà que notre inspecteur des impôts, terne, rangé, va, par la volonté des esprits, subir les assauts répétés, tempétueux et haletants d’une jeune femme du XVe siècle, ex-châtelaine du lieu et qui voit en lui la réincarnation de son chevalier d’amant d’il y a plus de quatre cent cinquante ans.
Et comme cet amour la démange depuis lors et que son esprit, par de sombres manipulations que nous découvrons au fil des pages, n’a pu monter aux cieux, le retour de flammes est, si j’ose dire, jouissif.
A partir de là, l’auteur s’en donne à cœur joie pour mettre en scène, et gentiment écorner au passage, toutes les sciences occultes et ce qu’elle comporte d’ésotérisme. Tout y passe et donne lieu à d’hilarantes séances d’écritures automatiques dans lesquelle la belle dicte ses quatre volontés à son inspecteur des impôts, déboussolé, comblé mais toujours amoureux d’une épouse qui, elle, se détache de lui.
Notre administration fiscale est elle aussi aimablement gaussée et l’auteur aura su même créé un nouvel humour, l’humour fiscal, franchement décalé et très under-statement !
Au détour de ces pages dévergondées et franchement hilarantes, l’auteur nous donne cependant à réfléchir à l’influence de notre inconscient sur notre perception du réel. Car la frontière de l’occultisme emprunte sans aucun doute celle de la psychologie, du refoulement, de désirs qu’il serait trop dangereux d’exprimer directement.
Toute l’histoire se déroule sur fond de vengeance quant à elle très moderne et mêle la manipulation à la volonté de découvrir ce que notre éduction, nos valeurs, notre sur-moi nous intiment de refouler.
Pendules, fantômes, orages et esprits parlants sont au menu constant d’une histoire qui se déroule à toute allure et ne menace jamais de s’enliser. Voilà un bouquin parfait pour un film à succès…
A lire sans la moindre hésitation et avec le regret d’un plaisir trop court !
Publié aux Editions Albin Michel – 282 pages
21.7.08
La correspondante anglaise – Anne Bragance
C’est avec un peu d’a priori que je m’étais saisi de ce roman, un jour de chaleur écrasante, dans le Sud, en pleines vacances d’été. Sans doute un roman féminin, écrit rapidement, sitôt lu, sitôt oublié, m’étais-je dit.
Finalement ce fut une sympathique surprise. Pas au plan de l’écriture, très simple, linéaire, immédiatement appréhensible, ce qui, sans doute, participe au charme de l’ouvrage.
Mais, Anne Bragance a su trouver un thème original et le mener au bout, sans faillir et en sachant retenir l’attention du lecteur légèrement réticent que je fus, du moins au début.
C’est à un dialogue entre deux amis de cinquante ans que nous invite l’auteur. Deux septuagènaires paumés au fin fond de la Normandie et qui se suivent depuis le berceau. Ils ont même fait la Légion ensemble et se connaissent par cœur.
Un dialogue drôle, enlevé et avec une énorme tendresse pour l’autre, celle qui permet d’effacer les petits défauts et de rendre un quotidien partagé suportable. Une tendresse qui sait pardonner les coups de gueule et les petites fâcheries qui ne durent jamais trop longtemps.
Deux originaux en tous cas. Joseph entretient une correspondance unilatérale puisqu’elle n’a jamais connu la moindre réponse, avec la Reine d’Angleterre, Elizabeth, qu’il admire et porte au pinacle. C’est elle qui donne un sens à sa vie et qui la rythme. C’est à elle qu’il confie ses soucis après que ses quatre enfants lui aient arraché l’héritage, une fois veuf, père au trop grand cœur non payé de retour. C’est aussi pour Elizabeth qu’il s’essaye à apprendre l’Anglais en baragouinant tout seul, de façon phonétique et répétant les phrases idiotes et inutiles que la méthode par cassettes lui impose à longueur de champ. Partir en Angleterre pour quelques jours est le projet de sa vie. Mais pour cela il faudra convaincre son ami, faire des choix, trouver l’argent et surmonter bien des obstacles.
Et puis, il y a son compère Samuel, plus rustre, plus introverti et dont la seule passion est le jardinage. Son rêve est de créer une rose en l’honneur d’un amour de jeunesse, un peu sorcière et qui fera parler d’elle d’une manière inattendue après que quarante huit décès de septuagénaires auront endeuillé le canton inexplicablement.
C’est à ce quotidien bousculé par la présence de la Presse, attirée par ces morts en série, que nous assistons. Un quotidien remis en question par une enquête policière qui vient troubler de vieilles habitudes et remettre en cause des certitudes.
Nous observons, mi-goguenards, mi-attendris, ces petites moqueries entre amis et qui renforcent une amitié inébranlable, capable de venir à bout dtout et de pardonner tout. Même la correspondance anglaise, inutile et ridicule mais qui va finalement déboucher sur une belle rencontre avec les bizarres habitants de l’île d’en face.
Bref, on passse un bon moment grâce à ce livre attachant, plein de trouvailles, enlevé et amusant. Ce n’est certes pas de la grande littérarture mais on ne l’oublie pas sitôt la dernière page refermée. Comme quoi, les a priori sont nos pires ennemis…
Publié aux Editions Stock – 228 pages
Finalement ce fut une sympathique surprise. Pas au plan de l’écriture, très simple, linéaire, immédiatement appréhensible, ce qui, sans doute, participe au charme de l’ouvrage.
Mais, Anne Bragance a su trouver un thème original et le mener au bout, sans faillir et en sachant retenir l’attention du lecteur légèrement réticent que je fus, du moins au début.
C’est à un dialogue entre deux amis de cinquante ans que nous invite l’auteur. Deux septuagènaires paumés au fin fond de la Normandie et qui se suivent depuis le berceau. Ils ont même fait la Légion ensemble et se connaissent par cœur.
Un dialogue drôle, enlevé et avec une énorme tendresse pour l’autre, celle qui permet d’effacer les petits défauts et de rendre un quotidien partagé suportable. Une tendresse qui sait pardonner les coups de gueule et les petites fâcheries qui ne durent jamais trop longtemps.
Deux originaux en tous cas. Joseph entretient une correspondance unilatérale puisqu’elle n’a jamais connu la moindre réponse, avec la Reine d’Angleterre, Elizabeth, qu’il admire et porte au pinacle. C’est elle qui donne un sens à sa vie et qui la rythme. C’est à elle qu’il confie ses soucis après que ses quatre enfants lui aient arraché l’héritage, une fois veuf, père au trop grand cœur non payé de retour. C’est aussi pour Elizabeth qu’il s’essaye à apprendre l’Anglais en baragouinant tout seul, de façon phonétique et répétant les phrases idiotes et inutiles que la méthode par cassettes lui impose à longueur de champ. Partir en Angleterre pour quelques jours est le projet de sa vie. Mais pour cela il faudra convaincre son ami, faire des choix, trouver l’argent et surmonter bien des obstacles.
Et puis, il y a son compère Samuel, plus rustre, plus introverti et dont la seule passion est le jardinage. Son rêve est de créer une rose en l’honneur d’un amour de jeunesse, un peu sorcière et qui fera parler d’elle d’une manière inattendue après que quarante huit décès de septuagénaires auront endeuillé le canton inexplicablement.
C’est à ce quotidien bousculé par la présence de la Presse, attirée par ces morts en série, que nous assistons. Un quotidien remis en question par une enquête policière qui vient troubler de vieilles habitudes et remettre en cause des certitudes.
Nous observons, mi-goguenards, mi-attendris, ces petites moqueries entre amis et qui renforcent une amitié inébranlable, capable de venir à bout dtout et de pardonner tout. Même la correspondance anglaise, inutile et ridicule mais qui va finalement déboucher sur une belle rencontre avec les bizarres habitants de l’île d’en face.
Bref, on passse un bon moment grâce à ce livre attachant, plein de trouvailles, enlevé et amusant. Ce n’est certes pas de la grande littérarture mais on ne l’oublie pas sitôt la dernière page refermée. Comme quoi, les a priori sont nos pires ennemis…
Publié aux Editions Stock – 228 pages
15.7.08
Antenora – Margaret Mazzantini
Antenora est le prénom d’une vieille dame, la grand-mère tout au long du récit, dont nous allons découvrir la vie rude, en quatre parties (l’enfance, la vie adulte de mère de famille, la vie une fois les enfants partis, enfin le veuvage).
Il y a du Rosetta Loy dans cet ouvrage : le même souci d’une saga familiale, certes très condensée ici, l’importance donnée aux descriptions, la souffrance physique et morale dans une Italie de la première moitié du vingtième siècle.
Fille d’un professeur, elle épousera un banquier dont la gentillesse et la bonhomie lui vaudront le surnom de nigaud. Bon mari, amant facile à satisfaire, bon père, il ne posera pas de souci à une épouse dont les jambes l’auront séduit.
Mère de quatre enfants, un de ses fils mourra très jeune du typhus. Pas eu le temps de s’y attarder, de toutes façons il fallait nourrir les trois survivants et faire tourner une maisonnée aux moyens tout juste suffisants.
Sur un rythme très lent, très intimiste, nous vivons de l’intérieur les évènements marquants de cette femme racontée par sa petite-fille préférée. Rien que de très ordinaire après tout mais bien écrit, posé, mélangeant les petites joies et les grandes peines, dépeignant avec pertinence les changements qui s’opèrent au fur et à mesure que la vie s’écoule.
Au fond, un livre tellement ordinaire par les thèmes qu’il traite qu’il est possible de s’y projeter. Il ne peut y avoir une situation dans laquelle vous ne puissiez vous reconnaître.
La limite rapidement atteinte de l’exercice est qu’en l’absence d’une écriture forte ou hyper-structurée, cette petite musique un brin doucereuse finit par déconnecter une attention insuffisamment sollicitée.
Bref, un livre sympathique mais loin d’être indispensable.
Publié aux Editions Robert Laffont - 171 pages
Il y a du Rosetta Loy dans cet ouvrage : le même souci d’une saga familiale, certes très condensée ici, l’importance donnée aux descriptions, la souffrance physique et morale dans une Italie de la première moitié du vingtième siècle.
Fille d’un professeur, elle épousera un banquier dont la gentillesse et la bonhomie lui vaudront le surnom de nigaud. Bon mari, amant facile à satisfaire, bon père, il ne posera pas de souci à une épouse dont les jambes l’auront séduit.
Mère de quatre enfants, un de ses fils mourra très jeune du typhus. Pas eu le temps de s’y attarder, de toutes façons il fallait nourrir les trois survivants et faire tourner une maisonnée aux moyens tout juste suffisants.
Sur un rythme très lent, très intimiste, nous vivons de l’intérieur les évènements marquants de cette femme racontée par sa petite-fille préférée. Rien que de très ordinaire après tout mais bien écrit, posé, mélangeant les petites joies et les grandes peines, dépeignant avec pertinence les changements qui s’opèrent au fur et à mesure que la vie s’écoule.
Au fond, un livre tellement ordinaire par les thèmes qu’il traite qu’il est possible de s’y projeter. Il ne peut y avoir une situation dans laquelle vous ne puissiez vous reconnaître.
La limite rapidement atteinte de l’exercice est qu’en l’absence d’une écriture forte ou hyper-structurée, cette petite musique un brin doucereuse finit par déconnecter une attention insuffisamment sollicitée.
Bref, un livre sympathique mais loin d’être indispensable.
Publié aux Editions Robert Laffont - 171 pages
11.7.08
Sept pierres pour la femme adultère – Vénus Khoury-Ghata
Un beau titre mais un résultat décevant.
Dans un village d’Asie aux portes du désert, loin des bruits de la construction d’un grand barrage, Noor attend son châtiment. Ses trois fils ont témoigné contre elle et l’ont désignée au cheik comme adultère. De cette liaison, alors qu’elle avait été abandonnée par son mari, joueur et plus ou moins voleur, Noor va se retrouver enceinte d’une vie qui se développe, malgré elle.
L’adultère signifie la mort par lapidation. Bientôt, les villageoises vont amonceler les pierres pour exécuter la fatwa et se partager les quelques modestes biens de la victime.
C’est sans compter sur la volonté farouche d’une humanitaire française qui va tout faire pour s’opposer à cette barbarie, pour sauver Noos et l’enfant qu’elle porte.
Pourtant, la communauté aura besoin d’une victime expiatoire et finira par la trouver.
Un beau thème malheureusement gâché par une écriture trop lâche, sans passion, sans saveur. Après quelques premières pages enchanteresses et dont il se dégage une réelle poésie, le récit s’essouffle. L’inspiration semble avoir désertée l’auteur. En tous cas, je sui resté constamment à l’extérieur de ce roman en regrettant une exploitation largement perfectible d’un thème qui l’aurait mérité.
Au moins y voit-on l’hypocrisie de l’occident qui ferme les yeux sur des coutumes d’un autre temps et les maux plus grands que les biens lorsque l’humanitaire se retire sans prévenir.
Mais rien quine justifie de se précipiter à tout prix sur ce roman. Dommage !
Publié aux Editions Mercure de France – 189 pages
Dans un village d’Asie aux portes du désert, loin des bruits de la construction d’un grand barrage, Noor attend son châtiment. Ses trois fils ont témoigné contre elle et l’ont désignée au cheik comme adultère. De cette liaison, alors qu’elle avait été abandonnée par son mari, joueur et plus ou moins voleur, Noor va se retrouver enceinte d’une vie qui se développe, malgré elle.
L’adultère signifie la mort par lapidation. Bientôt, les villageoises vont amonceler les pierres pour exécuter la fatwa et se partager les quelques modestes biens de la victime.
C’est sans compter sur la volonté farouche d’une humanitaire française qui va tout faire pour s’opposer à cette barbarie, pour sauver Noos et l’enfant qu’elle porte.
Pourtant, la communauté aura besoin d’une victime expiatoire et finira par la trouver.
Un beau thème malheureusement gâché par une écriture trop lâche, sans passion, sans saveur. Après quelques premières pages enchanteresses et dont il se dégage une réelle poésie, le récit s’essouffle. L’inspiration semble avoir désertée l’auteur. En tous cas, je sui resté constamment à l’extérieur de ce roman en regrettant une exploitation largement perfectible d’un thème qui l’aurait mérité.
Au moins y voit-on l’hypocrisie de l’occident qui ferme les yeux sur des coutumes d’un autre temps et les maux plus grands que les biens lorsque l’humanitaire se retire sans prévenir.
Mais rien quine justifie de se précipiter à tout prix sur ce roman. Dommage !
Publié aux Editions Mercure de France – 189 pages
4.7.08
A la vitesse de la lumière – Javier Cercas
Décidément, l’espace romanesque ibérique regorge de talents littéraires contemporains. Javier Cercas s’impose, avec ce roman, comme l’un des auteurs contemporains espagnols majeurs avec Antonio Munoz Molina, Xavier Marias et Juan Manuel de Prada dont vous trouverez dans Cetalir divers ouvrages bloggués.
D’ailleurs, il est étonnant de retrouver dans ce roman certains points qui sous-tendent plusieurs des œuvres des auteurs cités ci-dessus.
Comme avec De Prada dans le superbe et extraordinaire roman « La vie invisible », comme avec Marias dans « Fenêtres sur Manhattan », un des personnages centraux est américain et les Etats-Unis et la langue anglaise y tiennent un rôle absolument majeur. Un rêve d’ailleurs qui chaque fois ne manque pas de tourner à une forme de cauchemar.
Comme avec Marias et Molina, Cercas nous invite à un voyage intérieur. Un itinéraire plein de doutes, d’erreurs, de renoncements. Un parcours chaotique et douloureux, indispensable à la construction d’un moi qui s’assume. Non la vie n’est pas un long fleuve tranquille et la sérénité à laquelle tout un chacun aspire ne peut éventuellement se conquérir qu’après avoir franchi une succession d’épreuves.
C’est ce qu’il advient à un jeune écrivain espagnol, qui pourrait bien être Cercas et qui écrit des romans dont les titres sont ceux de Cercas, qui, un peu par hasard, par facilité, se retrouve professeur vacataire d’Espagnol dans l’université de la ville typiquement provinciale américaine d’Urbana.
Il y fera la connaissance d’un étrange personnage, Rodney Falk, professeur lui aussi d’Espagnol. Un géant à la démarche incertaine suite à une blessure de guerre. Un vétéran du Vietnam qui vit en marge de ses collègues et de la société et que le narrateur va peu à peu apprivoiser. Jusqu’à nouer une solide amitié qui va durer plusieurs décennies par-delà l’espace, le temps, les circonstances et la mort.
Cercas nous donne à réfléchir, sans leçons, sans poncifs, par simple exposition narrative, avec beaucoup de pudeur, sans effets littéraires, en toute simplicité, sur les circonstances qui peuvent profondément altérer notre personnalité.
Falk ne s’est jamais remis de la mort de son frère Bob qui a sauté sur une mine au Vietnam. Comme il ne s’est jamais remis d’une fuite en avant qui l’a conduit à se porter volontaire dans un escadron d’élite. Un escadron de la mort qui a pillé, violé, tué par centaines femmes et enfants, laissant d’innocentes victimes expier pour l’ennemi invisible. C’est la folie meurtrière qui est alors mise en scène, la jouissance inénarrable à priver l’autre de sa vie, à se croire Dieu tout puissant que nous conte Cercas en nous faisant plonger dans l’enfer psychique qui ronge Rodney. Un enfer qui l’empêche de se reconstruire, d’assumer. Un enfer qui le conduit, sans but, sur la route à chaque fois qu’il est au bord de se réintégrer, toujours rattrapé par ses démons.
En parallèle, Cercas nous donne à réfléchir sur l’impact du succès, celui de ce jeune auteur qui, brutalement, va devenir un auteur reconnu, choyé, riche de retour en Espagne, sans signe annonciateur. De ce succès, il ne se remettra pas. Les traits jusqu’alors globalement enfouis de sa personnalité vont prendre le dessus : mari volage, homme à femmes, alcoolique, menteur… C’est un tableau peu reluisant qui nous est dépeint. Il y perdra tout sauf l’amitié de Rodney, essentielle.
Il faudra des morts, encore, violentes et non désirées pour ramener ceux qui se sont écartés du chemin, pour comprendre et donner un sens. La rédemption pourrait passer par là.
La vitesse de la lumière c’est l’instant où, alors qu’on n’y croit plus, que la vie s’est chargée de tout vous donner puis de bien vite tout reprendre, soudainement, par fulgurance, chaque événement majeur s’imbrique et prend un sens global à toute sa vie. Celui où l’on sait, ou croit savoir, ce qui vaut d’être fait. Celui qui remet en route.
Il existe dans ce roman une puissance psychologique, une rare pudeur, une honnêteté qui en font un de ces livres qui comptent, qui sortent du lot.
Alors vous savez quoi faire…
Publié aux Editions Actes Sud – 287 pages
D’ailleurs, il est étonnant de retrouver dans ce roman certains points qui sous-tendent plusieurs des œuvres des auteurs cités ci-dessus.
Comme avec De Prada dans le superbe et extraordinaire roman « La vie invisible », comme avec Marias dans « Fenêtres sur Manhattan », un des personnages centraux est américain et les Etats-Unis et la langue anglaise y tiennent un rôle absolument majeur. Un rêve d’ailleurs qui chaque fois ne manque pas de tourner à une forme de cauchemar.
Comme avec Marias et Molina, Cercas nous invite à un voyage intérieur. Un itinéraire plein de doutes, d’erreurs, de renoncements. Un parcours chaotique et douloureux, indispensable à la construction d’un moi qui s’assume. Non la vie n’est pas un long fleuve tranquille et la sérénité à laquelle tout un chacun aspire ne peut éventuellement se conquérir qu’après avoir franchi une succession d’épreuves.
C’est ce qu’il advient à un jeune écrivain espagnol, qui pourrait bien être Cercas et qui écrit des romans dont les titres sont ceux de Cercas, qui, un peu par hasard, par facilité, se retrouve professeur vacataire d’Espagnol dans l’université de la ville typiquement provinciale américaine d’Urbana.
Il y fera la connaissance d’un étrange personnage, Rodney Falk, professeur lui aussi d’Espagnol. Un géant à la démarche incertaine suite à une blessure de guerre. Un vétéran du Vietnam qui vit en marge de ses collègues et de la société et que le narrateur va peu à peu apprivoiser. Jusqu’à nouer une solide amitié qui va durer plusieurs décennies par-delà l’espace, le temps, les circonstances et la mort.
Cercas nous donne à réfléchir, sans leçons, sans poncifs, par simple exposition narrative, avec beaucoup de pudeur, sans effets littéraires, en toute simplicité, sur les circonstances qui peuvent profondément altérer notre personnalité.
Falk ne s’est jamais remis de la mort de son frère Bob qui a sauté sur une mine au Vietnam. Comme il ne s’est jamais remis d’une fuite en avant qui l’a conduit à se porter volontaire dans un escadron d’élite. Un escadron de la mort qui a pillé, violé, tué par centaines femmes et enfants, laissant d’innocentes victimes expier pour l’ennemi invisible. C’est la folie meurtrière qui est alors mise en scène, la jouissance inénarrable à priver l’autre de sa vie, à se croire Dieu tout puissant que nous conte Cercas en nous faisant plonger dans l’enfer psychique qui ronge Rodney. Un enfer qui l’empêche de se reconstruire, d’assumer. Un enfer qui le conduit, sans but, sur la route à chaque fois qu’il est au bord de se réintégrer, toujours rattrapé par ses démons.
En parallèle, Cercas nous donne à réfléchir sur l’impact du succès, celui de ce jeune auteur qui, brutalement, va devenir un auteur reconnu, choyé, riche de retour en Espagne, sans signe annonciateur. De ce succès, il ne se remettra pas. Les traits jusqu’alors globalement enfouis de sa personnalité vont prendre le dessus : mari volage, homme à femmes, alcoolique, menteur… C’est un tableau peu reluisant qui nous est dépeint. Il y perdra tout sauf l’amitié de Rodney, essentielle.
Il faudra des morts, encore, violentes et non désirées pour ramener ceux qui se sont écartés du chemin, pour comprendre et donner un sens. La rédemption pourrait passer par là.
La vitesse de la lumière c’est l’instant où, alors qu’on n’y croit plus, que la vie s’est chargée de tout vous donner puis de bien vite tout reprendre, soudainement, par fulgurance, chaque événement majeur s’imbrique et prend un sens global à toute sa vie. Celui où l’on sait, ou croit savoir, ce qui vaut d’être fait. Celui qui remet en route.
Il existe dans ce roman une puissance psychologique, une rare pudeur, une honnêteté qui en font un de ces livres qui comptent, qui sortent du lot.
Alors vous savez quoi faire…
Publié aux Editions Actes Sud – 287 pages
Inscription à :
Articles (Atom)