29.8.08

Dolly City – Orly CASTEL-BLOOM

Une femme, Dolly, regarde son poisson rouge mourir. Après l’avoir extirpé du bocal, elle entreprend de le découper en fines lanières, pour l’étudier, avant que de l’ingurgiter avec indifférence. Puis, elle assiste à la lente agonie de son teckel qu’elle va finir par euthanasier.

Embarquée clandestinement sur le pick-up d’un fossoyeur barbare, elle découvre un bébé bleui dont elle va devenir la mère malgré elle.

Une mère, une femme en proie à la folie la plus complète. Médecin ayant fait ses études, non reconnues, à Katmandou, elle cède continûment à des pulsions d’angoisse qui la poussent à ouvrir son enfant pour l’ausculter de l’intérieur, lui greffer un rein inutile ou bien encore lui découper la peau du dos pour y dessiner la carte de l’état d’Israël.

Une angoisse qui lui fait grillager toutes ses fenêtres et jusqu’aux bondes des lavabos avant de les faire arracher le lendemain même, la nouvelle angoisse en résultant devenant encore plus compulsive que la précédente. Ne cherchez d’autre logique que celle d’une folie totale et arbitraire.

La puissance imaginaire d’Orly CASTEL-BLOOM est tout simplement éblouissante. Grâce à des répliques aussi farfelues que celles de « La cantatrice chauve », nous nous déplaçons avec Dolly dans un monde de folie hallucinatoire. Un univers effrayant où tuer, blesser, charcuter, baiser ne répondent à aucun interdit. Ils font au contraire partie d’un quotidien violent et vide de sens. Comme boire ou manger.

Il faut avoir un don extraordinaire pour entraîner le lecteur dans des séquences farfelues où rires et frissons d’horreur se succèdent et s’entremêlent. Un monde dont nous perdons les limites logiques et dans lequel assumer sa maternité nécessite que l’on se fasse coller, au sens physique, son enfant sur le dos.

Lorsque la folie devient trop dévastatrice, Dolly passe quelque temps en asile psychiatrique. Mais elle en réchappe toujours et poursuit une descente sombre et sanguinaire dans un monde dont elle est la seule à tenir la clé.

Cocasserie, humour décalé, rythme débridé constituent les ingrédients d’une incontestable réussite littéraire. Impossible de rester indifférent à une œuvre imaginative, décapante, ébouriffante même !

Vous adorerez ou vous détesterez : il n’y aura pas de juste milieu.

Publié aux Editions Actes Sud – 204 pages

Aucun commentaire: