« Le diable » fut le dernier roman de Pierre
Bourgeade, disparu l’été 2009. C’est un court roman, solidement construit et
qui dérange. Un roman sur les limites de nos convictions, de nos croyances et
de nos engagements. Un roman sur fond de terreur semée par les terribles
Brigades Rouges de l’Italie des années quatre-vingt.
Pierre Bourgeade décide de nous conter les doutes de trois
personnages que le destin va faire se croiser jusqu’à les briser.
D’un côté, un jeune vicaire qui ne connaît rien de la vie,
qui croit avoir trouvé en Dieu une vocation mais qui se laissera tenter par la
femme et les joies de l’amour. De l’autre, une jeune veuve qui commença sa vie
comme pute indépendante, puis serveuse topless dans un bar interlope avant
qu’un riche banquier, gentil et peu regardant, ne lui propose de l’épouser.
Depuis l’enlèvement, la torture et l’assassinat resté impuni de son homme, elle
vit recluse dans son domaine. La survenue du jeune vicaire, beau te tentateur,
va rallumer en elle le désir de la chair.
Au centre, un médecin qui a tout laissé tomber, par
conviction et engagement, pour rejoindre les Brigades Rouges qu’il
approvisionne en explosifs, au nez et à la barbe de la gendarmerie qu’il nargue
gentiment.
Malgré eux, par le désir des autres, chacun de deux hommes,
que le hasard fait se rencontrer et sympathiser, va devenir la proie d’un enjeu
qui le dépasse. Le vicaire, torturé par la chair, désiré et séduit par la
veuve, finira par tout laisser tomber pour s’envoler avec la belle.
Le terroriste, qui lutte contre les attentats aveugles et
milite pour les assassinats ciblés, va devoir choisir entre la vie de son fils
et celle d’innocents.
Ce qui frappe ici c’est la façon dont le terrorisme se fond
aveuglément dans notre quotidien, la facilité selon laquelle on peut devenir
l’ami de celui qui finira par faire de vous un ennemi, voire une victime, de
classe.
Tout cela est bien fait, modeste, et constitue une bonne
opportunité de découvrir cet auteur si vous ne le connaissiez pas.
Publié aux Editions Tristman – 2009 – 178 pages