L’écrivain d’origine
irakienne Sinan Antoon nous avait enchanté avec son premier roman « Seul
le grenadier » qui avait d’ailleurs été récompensé d’un Prix de la
Littérature Arabe fin 2017.
Son nouvel opus
« Ave Maria » s’attaque à un sujet sensible : celui du sort
réservé aux Chrétiens d’orient et tout particulièrement des Chrétiens irakiens
qui furent les victimes ciblées d’attentats odieux perpétrés lors de ce qui
tourna en guerre civile entre sunnites et chiites. Une guerre qui attisa la
montée des mouvements extrêmes islamistes transformant les Chrétiens en une
engeance à éliminer au nom de positions stupidement dogmatiques, de croyances
et de principes simplement épouvantables.
Pour rendre compte de
cette situation qui poussa des dizaines de milliers, au moins, de Chrétiens sur
les routes diverses de l’émigration, fuyant ainsi une mort presque certaine du
moins dans certaines parties d’un Irak dévasté et vaguement contrôlé par les
forces armées américaines, Sinan Antoon nous plonge dans la vie quotidienne de
deux personnages.
D’un côté un vieil homme,
arrivé au soir de sa vie. Un Chrétien sans histoire, veuf, et qui a vu sa
famille frappée par les deuils successifs et la fuite des enfants aux quatre
coins du monde. De l’autre une nièce, venant de fuir son village avec son mari
suite aux attentats innombrables ayant fini par causer la perte de son bébé
avant terme. Elle s’est depuis installée à l’étage de la maison de son oncle en
échange des courses et de la cuisine.
A tour de rôle, ils
passent en revue leurs souvenirs. Ceux des temps heureux, d’un Irak uni où il
faisait bon vivre en harmonie. Puis, vinrent les temps troublés ponctués
d’assassinats politiques qui finirent par porter un tyran au pouvoir. Et dans
cette Histoire que l’on revit à distance se nichent des pans d’histoires
personnelles et familiales, des fractures, des pertes douloureuses, des
victimes innocentes de plus en plus nombreuses de la folie meurtrière qui s’est
emparée d’un pays en totale dérive.
Tout s’achèvera en une
scène apocalyptique qui résume effroyablement l’irraison d’hommes dont le seul
but est d’instituer le chaos au mépris de tout.
Un beau livre, fort et
émouvant.
Publié aux Editions Actes
Sud – 2018 – 182 pages