Après deux premiers
romans fort réussis (« Et je
prendrai tout ce qu’il y a à prendre » puis « Des femmes qui dansent sous les bombes »), la
romancière par ailleurs également professeur de lettres dans le secondaire fait
paraître un troisième roman fort différent, moins impactant et qui nous a,
disons-le d’emblée, beaucoup moins séduit.
Roman d’anticipation,
situé dans un futur proche en un lieu quelconque. Peu importe, si ce n’est que
le manque d’eau potable s’est abattu sur le monde. Alors quand on est un petit
pays comme celui imaginé par l’auteur qui a su anticiper en faisant construire
une immense citerne censée subvenir aux besoins de la population, cela attise
forcément convoitise et bas instincts. D’où l’afflux massif de réfugiés venus
chercher le nouvel Eldorado dans un pays qui finit par se sentir envahi. Alors
quand un jour des extrêmistes font sauter la citerne, ceux qui ont bâti leur
avenir politique sur un populisme haineux en profitent pour confisquer le
pouvoir et mettre en place un régime autoritaire et bientôt totalitaire.
Dès lors, ce qui était un
petit paradis sur terre devient une prison à ciel ouvert où l’on confisque la
liberté de penser, d’agir et où l’on enferme tout individu ayant eu des
velléités d’exprimer leur refus d’adhérer à l’idéologie dominante. Bref, c’est
dans un monde possible, voire probable de manière inquiétante, que nous plonge
Céline Lapertot. Une façon d’éveiller les consciences de ceux qui seraient
tentés par une aventure que l’on sait d’avance suicidaire. Un geste louable
mais dont la portée reste douteuse car quelle est la probabilité que ceux qui
réfléchissent sur de fausses bases soient tentés de lire le roman d’une auteur
encore assez confidentielle ?
L’exercice tient d’autant
plus du pari osé que la composition du roman où la parole est successivement
donnée à divers personnages dont on éprouve le plus grand mal à comprendre qui
ils sont vraiment et quels rôles ils jouent dans un pays qui demeure trop vague,
crée une distance permanente entre le récit et le lecteur. Une distance qui
pourra pousser certains à abandonner la lecture avant qu’un rythme plus
convaincant ne s’installe, passé un gros premier tiers.
Si l’intention est
louable, la méthode ici manque de force de conviction. Dommage.
Publié aux Editions
Viviane Hamy – 2018 – 144 pages