Il m’arrive régulièrement de m’enthousiasmer
pour des romans souvent injustement méconnus et dont Cetalir vous recommande la
lecture.
Il arrive aussi, moins souvent fort
heureusement, qu’un roman me laisse à l’écart de ce que son auteur a voulu
véhiculer. « Pêches glacées », vous l’aurez compris, tombe dans cette
deuxième catégorie des déceptions avérées.
Sans doute la faute à une trame narrative
d’une extrême confusion, vraisemblablement pour évoquer la même confusion qui
s’empare des souvenirs d’une cohorte de protagonistes qui gravite autour de
trois Elsa. Un même prénom pour trois personnages aux destins tragiques et
appartenant à une même lignée familiale. Comme l’auteur bascule sans crier gare
et sans aucune prévention pour son lecteur d’une Elsa à l’autre, projetée sur
deux longues générations, ledit lecteur a tôt fait d’en perdre son latin. Du
coup, ou bien l’on adhère à un style mélancolique, au parti-pris d’une
succession de tableaux dont le sens n’apparaît que peu à peu et dans la plus
totale confusion, ou bien l’on persévère parce que l’on espère que le roman va
enfin sortir d’une torpeur languissante et qu’il faut bien en dire quelque
chose sur Cetalir. Et bien non, hormis les trente dernières pages qui enfin
s’animent et nous permettront d’en apprendre plus sur les malheurs de ces trois
jeunes filles.
Le titre lui-même est assez déroutant. En
fait, avec la guerre civile espagnole, la recette des pêches glacées semble
s’être perdue. Pour la retrouver, il faut effectuer un travail de mémoire,
interroger les anciens pour tenter de redonner vie à ce qui menace d’avoir
disparu à jamais.
C’est ce qui se passe avec nos trois Elsa.
Elsita, la petite fille qui disparaît un jour de canicule dans la montagne,
sans que jamais on ne retrouve trace d’elle, du moins jusqu’à la fin de ce
roman chaotique. Petite Elsa, jolie jeune fille enrôlée dans une secte, l’ordre
du Graal, dont elle deviendra l’offrande sexuelle soumise avant de s’échapper
et de s’exiler sous protection policière pour tenter de s’extraire à ses
bourreaux. Grande Elsa, la cousine aînée de Petite Elsa, artiste peintre et
dilettante, qui elle-même doit s’exiler de sa ville natale car l’ordre du Graal
la prend pour l’autre et veut à tout prix la réduire au silence.
Chacune de ces jeunes filles gravite autour de
personnages dont certains se connaissent, beaucoup s’ignorent, et dont la
fréquentation va leur permettre de reconstituer partiellement ce qui compose
leur propre histoire perdue, les secrets enfouis sous la guerre civile et
ignorés jusque là par une famille aussi larguée que le lecteur…
Arrêtons là. Soulignons que d’autres ont
visiblement apprécié puisque ce roman espagnol fut consacré par le prix Planeta en 1999.
Publié aux Editions Actes Sud – 295 pages