Une fois de plus, T.C. Boyle, un des grands romanciers
américains contemporains, a frappé fort. « Talk Talk » (qui signifie
en Anglais le langage des sourds qui combine agitation fébrile des mains –
fébrile pour les entendants du moins – avec onomatopées) est un trhiller
solidement charpenté, riche en rebondissements et qui, nous sommes en Amérique,
se terminera en forme de relative happy end… Le vrai danger en est, qu’une fois
commencé, nous risquez de ne plus vouloir décoller du bouquin, rivé par
l’intrigue et le sens du suspens que distille en maître, l’auteur.
« Talk Talk » est aussi un roman sur l’identité.
Qui sommes-nous vraiment, quelles sont nos véritables aspirations, comment
réagirons-nous face à un effondrement de notre quotidien rassurant ? Mais
également, à l‘heure de l’internet et du redoutable accès qu’il peut permettre
y compris à des données censées être confidentielles, que sommes-nous lorsque
nos codes d’accès sont violés, nos comptes en banque vidés, notre passé de
citoyen vertueux et respectueux soudain anéanti par la faute d’un criminel
usurpateur de votre identité ?
C’est précisément ce qui arrive à Dana Halter, devenue
sourde à l’âge de quatre ans suite à une maladie. Dana menait jusqu’ici une vie
relativement aisée, malgré son handicap. Professeur de littérature dans une
école pour sourds de Californie, portant une resplendissante trentaine,
amoureuse et aimée d’un homme plus jeune qu’elle, sa vie va basculer lorsque, à
l’occasion d’une banale vérification d’identité, elle va se retrouver menottée,
arrêtée et emprisonnée pour des délits financiers qu’elle n’a jamais commis.
Quand sa bonne foi sera enfin reconnue, elle n’aura de cesse
que de traquer celui qui lui a emprunté son nom, ses comptes, son numéro de
sécurité sociale etc… en embarquant avec elle son ami, un peu malgré lui.
Commence alors une longue course poursuite qui nous fera
parcourir la totalité des Etats-Unis d’Ouest en Est et au cours de laquelle la
haine, la soif de vengeance, la volonté de faire définitivement établir son
innocence vont se renforcer. Chaque occasion de croiser, virtuellement ou
physiquement, l’usurpateur donnera l’opportunité à T.C Boyle de déployer des
trésors d’inventivité pour continuer de rendre vraisemblable un scenario qui,
cependant, tend à s’effilocher au fur et à mesure que les chapitres défilent.
Pas au point de lasser le lecteur mais le livre perd en intensité à force de
multiplier les rebondissements et de faire, un peu trop, appel au facteur
chance.
L’un des atouts de ce roman est de bien analyser les
ressorts psychologiques qui poussent un individu instable, violent et
manipulateur à mener grand train de vie en faisant payer celles et ceux qui n’y
sont pour rien. C’est probablement même la partie fondamentalement la plus
aboutie du livre.
Si vous vous satisfaites d’une intrigue hollywoodienne et
d’un style simple, idéal sur la plage par exemple, alors vous trouverez en
« Talk talk » de quoi répondre à vos attentes.
Publié aux Editions Grasset – 440 pages