23.9.06

La grande peur dans la montagne – Charles-Ferdinand Ramuz

Connaissez-vous Charles-Ferdinand Ramuz ? Pour ma part, j’avoue que si un proche ne m’en avait pas parlé, j’aurai sans doute passé le reste de mon existence dans l’ignorance de cet auteur suisse, d’expression française, de la fin du XIXe début du XXe siècle.

Il est vrai qu’il ne s’agit pas d’un écrivain majeur, loin s’en faut. J’avoue d’ailleurs que cette « Grande Peur dans la Montagne » m’a laissé sur ma faim. N’en déplaise à Monsieur Jacques Chessex, auteur d’une préface érudite mais que j’oserai prétendre surfaite. Pourtant, tous les ingrédients étaient là pour réaliser un roman fébrile, hallucinatoire, au sens propre, fantastique dans la lignée d’un Edgar Poe.

Une malédiction, vingt ans plus tôt sur une équipe de vachers partie dans les alpages qui connaîtra mort et infortune. Depuis, plus personne ne s’aventure sur cette herbe verte et grasse car « Il » guette. Le temps passant, les jeunes prenant le pouvoir municipal et nécessité faisant loi, voici qu’une gentille expédition va se mettre sur pieds pour mener le troupeau excédentaire du village paître en toute tranquillité. Fête et tradition populaire à l’encan.

Mais voilà, laissez enfermés sept hommes dissemblables dans un chalet au confort sommaire, en altitude, laissez les phobies agir, les vieilles peurs poindre et bientôt l’enfer apparaîtra, les volontés se déliteront, la panique règnera emportant tout, y compris le village, sur son passage. Un livre sur les ravages de l’hallucination et l’hystérie collectives où tout acte logique se dérobe à la volonté affirmée de voir la manifestation du Mal, la vengeance de la montagne qu’on a osé braver. Un livre sur la nécessité d’interpréter une série malencontreuse d’accidents par la puissance supérieure d’un Etre vaguement humanoïde.

Un livre où chaque séquence majeure est ponctuée par une couleur particulière de la montagne, rendue monstrueusement caractérielle. Un livre où bruits et silences ont pour rôle de prévenir le lecteur attentif de l’imminence d’une nouvelle catastrophe. Ce sont les plus belles pages de ce petit roman, sans doute possible.

UIn livre malheureusement desservi par une écriture quelque peu apathique, une lenteur consciemment voulue, celle qu’ont les pensées de ces rudes paysans à se former, mais qui à force de répétition finit par nous lasser. L’ennui guette vite y compris le lecteur.

Tous les ingrédients étaient pourtant là pour faire de ce livre une réussite mais la recette en fut gâchée… A quand la version relookée XXIe siècle ?

185 pages – Le Livre de Poche

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