21.7.19

Les Terranautes – TC Boyle


Après avoir envoyé une poignée d’hommes et de femmes tourner autour de la Terre afin de tester les capacités d’adaptation individuelle et de résistance d’un petit groupe à vivre en espace confiné, restait à étudier le comportement d’un groupe enfermé dans un écosystème clos à la surface de notre planète. Un espace censé être autonome. C’est ce que le milliardaire américain et son équipe entreprend en construisant une bulle en plein désert de l’Arizona appellée E2 (par opposition à la Terre nommée E1).
Dans cet écosystème reproduisant un climat tropical  où ont été importés quelques têtes de bétail, poissons, insectes et autres mammifères en quantité limitée, quatre hommes et quatre femmes sont envoyés pendant une période de deux ans sans la moindre possibilité de sortir. A eux de se débrouiller pour se nourrir à base d’une alimentation peu calorique, faire prospérer le peu de terre et d’eau dont ils disposent et, surtout, vivre ensemble.
Car quoi de plus usant, le temps passant, que de devoir supporter les tics de celles et ceux que l’on finit par connaître par cœur, sans la moindre possibilité d’y échapper ? Surveillée comme le lait sur le feu par l’équipe qui supervise l’expérience, mitraillée par les touristes qui viennent les photographier comme on photographie les animaux de zoo, bombardée par la presse, cette petite troupe d’humains va bientôt montrer bien des fissures et transformer la joie exubérante des débuts en un enfer sous serre.
Car, bien vite, ce sont les personnalités profondes qui se révèlent. Celles ou les calculs sont omniprésents, les manipulations légions, les mensonges monnaie courante et les trahisons aussi fréquentes que douloureuses. Quand en outre, les histoires d’amour s’en mêlent, c’est The Loft combiné avec Koh Lanta, sans possibilité de fuite.
TC Boyle nous plonge au cœur de ces passions et de ce qui va se transformer peu à peu en une déroute. Pour ce faire, il donne tour à tour la parole à trois personnages. Un homme et une femme, dont la vie va basculer dans E2, et une femme recalée, restée dans E1, ressassant sa rancune et ses névroses multiples. Dans cet univers à trois, on découvre que tout le monde manipule tout le monde : les concepteurs d’E2, la presse et les humains Terranautes ou postulants ; la presse, le public ; les Terranautes, les postulants à le devenir. Et surtout ces huit humains livrés à eux-mêmes sous des regards inquisiteurs et pas toujours bienveillants et que l’ennui, la famine, la jalousie finissent par propulser dans un Huis Clos sartrien.
D’un point de vue psychologique, c’est bien fait. D’un point de vue littéraire, on regrettera une écriture sans relief et une histoire qui traîne interminablement en longueur, à l’image d’une expérience conçue pour durer un siècle par pas de deux ans. Une expérience pleine de surprises, soyons-en sûrs !
Publié aux Editions Bernard Grasset – 2018 – 590 pages