Jusque-là, la vie se déroulait de façon paisible dans ce
petit village du sud de la France, du côté du massif des Maures. Beaucoup
d’Anglais en villégiature, trustant les bars et les villas luxueuses. Un gentil
petit couple d’adolescents que leurs parents, bien permissifs, laissent
allégrement découvrir les jeux de l’amour et du sexe à à peine quatorze ans. Et
puis, en face de chez eux, clos derrière une muraille qui fait jaser, un
millionnaire original, passionné d’art et vivant lui aussi une passion
déraisonnable pour une femme considérablement plus jeune que lui, bien en
chair, un peu à la manière d’une de ces filles de Rubens dont il admire la
peinture.
Et puis un jour, l’impensable survient. Un tigre maintenu
secrètement en captivité dans l’immense parc de la villa du fortuné original
s’échappe. Après avoir attaqué un chien et une passante, il s’enfuit semant
panique et terreur. L’armée, la gendarmerie seront rameutées en vain. Rien n’y
fait, impossible de trouver la bête sauvage. Alors, on fait appel à un Anglais
traqueur de cet animal, un art qu’il a appris en Inde et en Afrique.
Sur cette traque qui sert de prétexte et de fil rouge à son
roman, Patrick Grainville élabore une histoire qui ne cesse de tourner autour
des jeux de l’amour, de la séduction et de ses déceptions.
Pendant que les deux adolescents s’adonnent avec frénésie à
la découverte de tous les plaisirs que leurs corps peuvent leur réserver, leurs
parents se déchirent sur fond d’adultère entre la mère du jeune homme et le
père de la jeune fille. Plus la traque progresse, plus les couples explosent
comme si la folie qui entoure l’animal recherché se déportait sur les humains.
D’autant que le traqueur britannique engagé semble plus préoccupé à tenter sa
chance auprès d’une belle jeune femme jouant un jeu dangereux avec l’animal
qu’à effectuer la mission pour laquelle on l’a engagé. Et puis, pendant ce temps,
la plantureuse amante du riche célibataire s’est fait la malle en Thaïlande
pour, là encore, éprouver de pervers frissons entre tigres tenus en laisse et
moines bouddhiques qu’elle ne va pas tarder à débaucher.
Ce jeu permanent de l’amour, de ses tentations, de ses
rebondissements est ce que Grainville appelle le « démon de la vie ».
Certes. Mais fallait-il pour autant imaginer une histoire aussi emberlificotée ?
On a grand-peine à adhérer à un récit qui finit par traîner en longueur à force
de tenter de multiplier des situations qui se veulent cocasses et ne font que
tomber à plat. J’ai du vraiment me forcer pour ne pas, moi aussi, laisser
tomber la traque en refermant à jamais un roman que j’oserai qualifier de tout
juste moyen.
Publié aux Editions du Seuil – 2016 – 275 pages