Blog d'humeur littéraire - Livres, lectures, romans, essais, critiques. La lecture comme source de plaisir, d'inspiration et de réflexion.
Qui êtes-vous ?
- Thierry Collet
- Cadre dirigeant, je trouve en la lecture une source d'équilibre et de plénitude. Comme une mise en suspens du temps, une parenthèse pour des évasions, des émotions que la magie des infinis agencements des mots fait scintiller. Lire m'est aussi essentiel que respirer. Lisant vite, passant de longues heures en avion, ma consommation annuelle se situe entre 250 et 300 ouvrages. Je les bloggue tous, peu à peu. Tout commentaire est bienvenu car réaliser ces notes de lecture est un acte de foi, consommateur en temps. N'hésitez pas également à consulter le blog lecture/écriture auquel je contribue sur le lien http://www.lecture-ecriture.com/index.php Bonnes lectures !
5.4.12
Bons baisers de Cora Sledge - Leslie Larson
La vie en maison de retraite médicalisée peut réserver bien des surprises tant pour celles et ceux qui s’y trouvent que pour ceux qui y ont envoyé leurs parents. A quatre-vingts ans, Cora Sledge n’est plus autonome. Bourrée d’un cocktail de médicaments qu’elle ingurgite pour faire face à ses angoisses constantes, Cora évolue dans un brouillard comateux qui masque sa triste réalité. Obèse et poussive, elle n’est plus capable de s’assumer seule dans la maison qu’elle a habitée avec son mari pendant des décennies maintenant qu’il est décédé. C’est pourquoi ses enfants, répartis aux quatre coins des Etats-Unis, ont décidé de la placer dans une maison médicalisée où s’entassent des vieillards cacochymes en attente du grand départ définitif.
Toutefois, Cora ne rêve que de s’échapper de ce qu’elle considère être un enfer où on la maintient malgré elle. Un enfer marqué par les rivalités individuelles entre les femmes qui continuent de faire assaut de séduction pour tenter d’attirer à elles les quelques hommes encore à peu près valides. Un enfer où l’égoïsme, la volonté d’en imposer aux autres ou de se mettre en avant y compris en usant de perfidie n’ont pas abdiqué face au grand âge, les bassesses humaines restant ce qu’elles sont.
Pour se venger de ses enfants qui l’ont remisée là où elle refuse d’être, Cora décide d’entreprendre la rédaction d’un journal qui, bientôt, deviendra le récit des grands et petits secrets d’une vie qui ne fut pas toujours simple et dont ses enfants sont loin de tout savoir. Au fur et à mesure que les chapitres d’une vie dure, faite de déceptions et de tristesse plus que de joie et de liberté, vont s’égrainer, nous comprenons mieux ce peuvent être les ressentiments de Cora. Mais, en parallèle, la rencontre avec Vito, un encore bel homme émigré d’un pays de l’Est dont Cora ne sait rien va bouleverser la vie de l’octogénaire car l’amour peut frapper n’importe où, n’importe quand et à n’importe quel âge.
Vito a tout de l’homme qu’elle a toujours rêvé de rencontrer et lui redonne le goût de vivre au point de perdre à une vitesse effrayante un peu de son poids superflu et de se débarrasser de ses médicaments qui la font évoluer dans un monde parallèle. Elle n’aura bientôt qu’une idée en tête : fuir avec Vito et refaire sa vie dans sa maison profitant des dernières moments pour couler une existence enfin paisible.
Sur la base de cette intrigue, Leslie Larson construit un joli roman touchant qui montre que, rarement, la vie prend le chemin qu’on aurait rêvé suivre. Souvent, les espoirs sont déçus. Souvent, les autres ou les circonstances se jouent de vous comme nous le verrons à de fréquentes reprises au sein de ce microcosme agité qu’est la maison de retraite. Les traits de caractère et la psychologie des divers personnages y sont bien campés et l’on sourit souvent aux situations surprenantes et pleines de rebondissements qu’invente l’auteur. Certes, nous sommes très loin d’un livre au style particulièrement léché ou d’un livre indispensable, mais Leslie Larson a au moins le mérite de nous proposer un roman facétieux sur un thème grave, bien tourné, et qui vous fera passer un bon moment. Ce n’est déjà pas si mal.
Publié aux Editions 10/18 – 2011 – 380 pages