Yves Ravey aime
les histoires peu ordinaires. Celles où, derrière les apparences bourgeoises et
provinciales se dissimule tout ce que l’humanité peut recéler de trivialité, de
bestialité et de stupidité. Autant dire que le sujet est inépuisable…
Avec cette
novella, Ravey nous donne une fois de plus la démonstration de son talent.
Voici un village comme il en existe des centaines en France. Un bourg où tout
se rythme autour du café, de l’Eglise et dans le respect un peu suspect et l’autorité
vaguement féodale des notables comme le notaire, Maître Montussaint.
Dans cette
concentration d’existences insipides et creuses, Madame Rebernak tente de faire
face. Depuis la mort de son mari, elle doit subvenir par elle-même aux besoins
de sa famille en faisant des ménages à l’école communale. Son souci principal
est de protéger sa fille Clémence, la petite amie du fils du notaire depuis que
le cousin Freddy fraîchement sorti de prison pour viol est venu s’installer à
quelques encablures d’une maison où il n’est pas le bienvenu.
Mais le danger ne
vient pas toujours de là où on l’attend. A la manière d’un Chabrol, Yves Ravey
élabore un scénario et une composition où, derrière une intrigue qui paraît un
temps linéaire, se matérialise un drame qui n’a rien d’ordinaire. Et, comme
avec Chabrol, la conclusion a peu de chance de correspondre à ce que vous
auriez pu imaginer.
C’est une fable
sociale, une version caustique de la lutte des classes que nous conte avec
mordant un auteur aussi inspiré que brillant. Voilà un livre parfaitement
immoral et croustillant. Une de ces petites choses qui se dévorent et se lisent
d’un trait en laissant un sourire vaguement cynique à un lecteur comblé.
Publié aux
Editions de Minuit – 2014 – 109 pages