Comme l’explique l’auteur
dans une très intéressante postface, c’est une histoire vraie survenue dans le
Massachusetts au temps où elle y
résidait qui a au départ inspiré Joyce Maynard. Celle d’un homme, sans histoire,
retrouvé mort chez lui avec toutes les apparences d’un cambriolage ayant mal
tourné. Jusqu’à ce que, divers indices et rumeurs à l’appui, on finisse par
soupçonner et confondre l’épouse qui avait joué la parfaite femme éplorée et
son jeune amant mineur. Loin de vouloir se lancer dans une version romancée de
cette histoire qui avait fait la une de l’actualité locale et nationale pendant
de longues semaines et valu aux inculpés de figurer dans le premier procès
criminel jamais filmé par la télévision, Joyce Maynard explique avoir voulu
s’intéresser aux et explorer les mécanismes qui ont pu conduire les différents
protagonistes à agir comme ils l’ont fait.
A cela, trois raisons
expliquant pratiquement tous les crimes : l’ambition, l’argent et le sexe.
Pour Suzanne, l’épouse,
ce sera l’ambition démesurée. Celle de vouloir à tout prix devenir une
présentatrice vedette de la télévision. Une ambition qui depuis sa plus tendre
enfance l’a amenée à tout écraser sur son passage : son père qu’elle
manipule comme un pantin, sa sœur aînée qu’elle a marginalisée, ses camarades
de classe dont elle a fait ses esclaves et les hommes, en général, dont elle
obtient tout ce qu’elle veut usant de son charme ou de son corps pour parvenir
sans vergogne à ses fins.
Pour son jeune amant,
c’est le sexe qui sera le moteur. Celui offert par une femme plus âgé que lui,
expérimentée et délicieusement perverse, prête à le déniaiser et à lui faire
découvrir l’infinie possibilité qu’offrent les jeux érotiques et dangereux.
C’est la promesse d’un futur jusque-là inimaginable qui poussera un adolescent
aussi bête que naïf à se laisser piéger par une tigresse qui n’hésitera pas à
en faire le coupable idéal le moment venu.
Pour le comparse de ce
dernier, c’est l’argent, toujours manquant, qui sera le facteur motivant. Celui
promis pour liquider le mari gênant à une petite frappe dégénérée et issue d’un
milieu familial totalement dysfonctionnel.
Comme nous connaissons
dès le début le dénouement, ce n’est pas à celui-ci que nous nous intéresserons
vraiment mais à la façon dont les pièces d’un gigantesque puzzle vont finir par
s’agencer. Chaque protagoniste de l’affaire, de près ou de loin, s’exprime à
tour de rôle donnant sa version des faits, son sentiment sur ce qu’il vit ou
perçoit. D’où un récit très fluide, très vivant qui met en évidence les
terribles contradictions et les recoupements des témoins ou protagonistes
interrogés par la police. Peu à peu se dessine le tableau d’une femme prête à
tout pour servir son ambition et ses dessins personnels. Une femme odieuse,
manipulatrice et perverse à un point à peine imaginable.
Un scénario parfait dont
s’est emparé Gus van Sant pour en faire un film en 1995.
Publié aux Editions
Philippe Rey – 1995 – 335 pages